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Social TV

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(Télévision sociale). L’expression désigne les nouveaux usages nés de l’alliance de la télévision et du Web 2.0. Depuis 2010, les chaînes de télévision multiplient les initiatives, sites web interactifs, applications mobiles et réseaux sociaux, afin d’adapter leurs programmes aux pratiques communautaires dominantes sur Internet qui transforment les modes de consommation télévisuelle. Les réseaux sociaux ont eu raison de la consommation linéaire de la télévision. Ne pouvant sous-estimer l’impact de Facebook et Twitter, sans prendre le risque de se priver de leur audience, la télévision fait sa mue en s’adaptant aux nouvelles pratiques de partage et de recommandation sur le Web.

Sont apparus en premier les agrégateurs de discussions en ligne permettant à chacun de suivre ce qui se dit sur les réseaux sociaux à propos de ses émissions et séries préférées en cours de diffusion, à l’image du site Devantlatele.com, premier site français de télévision sociale lancé fin 2010. Sur ces sites, les fans partagent leurs impressions à propos d’une soirée TV et peuvent, le cas échéant, dialoguer avec des célébrités. De même, les applications lancées par les chaînes sur Facebook offrent la possibilité de visionner certains programmes en streaming, tout en dialoguant entre amis sur la plate-forme. Tous les genres de programmes, émissions de cuisine, télé-crochets, retransmissions sportives ou émissions politiques, misent désormais sur la participation des internautes en intégrant notamment dans leurs contenus le flux des conversations tenues sur les réseaux sociaux. Une fois passés au crible de la modération, questions et commentaires postés sur Facebook ou Twitter sont sélectionnés pour être diffusés à l’antenne, expérience vécue comme gratifiante par les internautes, surtout s’ils bénéficient d’une reprise (tweet replay) sur le site web de la chaîne pour illustrer les meilleurs moments d’un programme.

Il est de plus en plus fréquent de voir apparaître à l’écran le hashtag (voir REM n°21, p.37) d’une émission en cours de diffusion incitant les téléspectateurs à utiliser Twitter pour faire part de leurs commentaires ou dialoguer, le cas échéant, avec les invités sur le plateau, à l’instar de The Voice, le télé-crochet de TF1. Selon le même esprit participatif, l’émission politique Mots croisés du 16 avril 2012 sur France 2 a proposé aux téléspectateurs d’interroger les candidats à l’élection présidentielle via Facebook, une première en Europe. Les chaînes favorisent le buzz (la rumeur) sur Internet, s’assurant ainsi une promotion à moindres frais de leurs programmes, chacun invitant par sa participation ses amis à s’y intéresser.

La social TV répond avant tout à cette capacité de consommer des images adoptée par les digital natives qui consiste à suivre un programme sur un récepteur de télévision tout en consultant leur page Facebook sur un ordinateur, en twittant ou en téléphonant en même temps. Plus de la moitié des téléspectateurs regardent la télévision tout en étant connectés à Internet sur un autre écran, et les trois quarts des moins de 25 ans discutent en ligne avec leurs amis ou commentent les émissions sur Facebook et Twitter. Ainsi, cette pratique du « multi-écran » a poussé les diffuseurs à instaurer davantage d’interactivité dans leurs programmes. L’enjeu est important pour les chaînes si elles ne veulent pas perdre l’attention de plus en plus sollicitée des téléspectateurs-internautes.

Tandis que le téléphone portable s’impose progressivement comme le moyen privilégié d’accéder à Internet, les chaînes de télévision développent de nouveaux outils permettant aux mobinautes d’interagir plus activement et en direct avec leurs émissions. La télévision sociale est à l’origine d’un nouveau marché, celui des applications pour le « second écran », le smartphone ou la tablette, baptisé TV compagnion (compagnon de télévision). C’est ainsi qu’apparaît dorénavant sur l’écran de télévision un bandeau invitant les mobinautes-téléspectateurs à télécharger une application pour participer en direct, par exemple, à un jeu télévisé.

Téléchargée à plus de 100 000 exemplaires depuis son lancement en novembre 2011, l’application du jeu Seriez-vous un bon expert sur France 2 permet de jouer depuis son salon en même temps que les candidats présents sur le plateau. Les données du « prêt-à-diffuser » de cette émission enregistrée sont transférées vers les smartphones avant le passage à l’antenne, l’identification à l’écran se faisant, quant à elle, grâce à un code barre (QR Code).

Une autre forme d’innovation en matière de télévision sociale a été présentée par la chaîne d’information France 24 à l’occasion de la soirée du second tour de l’élection présidentielle 2012. L’application Direct 360 a permis aux téléspectateurs de regarder le débat télévisé comme s’ils y étaient. Une caméra dotée de six objectifs placée au centre du plateau qu’ils pouvaient piloter à leur guise, a offert aux mobinautes et aux tablonautes une sensation d’immersion inédite, une première mondiale pour iPhone et iPad. Chacun pouvait suivre en direct l’invité de son choix grâce au mode de navigation tactile ou à l’accéléromètre, et d’un clic obtenir des informations complémentaires en « réalité augmentée » (voir REM n°10-11, p.39) concernant les intervenants au débat.

La télévision sociale marque l’arrivée d’une réelle interactivité, promise de longue date mais restée bien limitée dans les faits. Les applications les plus innovantes utilisent les technologies de reconnaissance de contenus grâce au marquage (watermarking ou fingerprinting) des programmes audiovisuels. Ainsi, un smartphone doté d’une application ad hoc reconnaît un programme en cours de diffusion sur une chaîne de télévision permettant ainsi aux mobinautes-téléspectateurs de le sélectionner afin de le partager avec leurs amis sur les réseaux sociaux. Ils peuvent aussi obtenir toutes sortes de bonus qui sont liés au programme choisi (jeux, quizz, coupons de fidélité…). C’est ce que permet l’application TV Check, première du genre, initiée par Orange en 2011. Une autre application révolutionnaire, Zeebox a été lancée sur l’iPad au Royaume-Uni en 2011 : véritable guide de programmes, elle repose sur l’analyse en continu de la diffusion de plus de soixante chaînes de télévision. Zeebox indique aussi ce que sont en train de regarder vos amis sur Facebook grâce à l’Open Graph et diffuse des fils de tweets classés par hashtag de programme. En outre, l’application agrège des contenus de toute nature liés au programme diffusé (articles de presse, définitions sur Wikipédia, interviews, photos, etc.) et suggère l’achat de séries, de films, de musiques par affinité sur iTunes, le magasin en ligne d’Apple.

La social TV est aussi un nouvel outil publicitaire. La publicité sur le second écran offre des possibilités de ciblage inédites. L’éditeur du célèbre logiciel de reconnaissance musicale Shazam s’est lancé dans le marquage des publicités télévisées. Avec l’application Shazam TV créée en 2010, les écrans publicitaires s’ouvrent eux aussi à l’interactivité et à la « réalité augmentée » offrant des informations sur les produits et autres contenus marketing pour fidéliser les consommateurs. Ainsi, un spot de 30 secondes se transforme en une consultation de plusieurs minutes des messages promotionnels accessibles sur un smartphone. Utilisée aux Etats-Unis pour les écrans publicitaires du Super Bowl et des Grammy Awards, l’application Shazam TV servira prochainement à enrichir des épisodes de série TV, apportant des informations subsidiaires en temps réel. Grâce à la technique de reconnaissance de contenu, l’application Zeebox peut proposer, elle aussi, des publicités en rapport avec le programme regardé ou encore reconnaître la publicité diffusée à la télévision et mettre en relation avec le site marchand correspondant.

Formidable instrument générateur d’audience, la social TV ajoute une dimension qualitative à la traditionnelle mesure quantitative de l’audience. Les échanges sur les réseaux sociaux permettent de collecter une mine d’informations sur les attentes, les goûts, les habitudes, les affinités des consommateurs. Les outils de veille et d’analyse se développent pour mesurer « l’audience sociale », au nombre de commentaires, mais également selon la nature des réactions engendrées. Le premier impact d’ores et déjà quantifiable est l’augmentation du temps d’attention porté à un programme, les internautes dialoguant sur les réseaux sociaux avant, pendant et après sa diffusion. La télévision sociale réinvente la conversation en ligne, permanente et réactive.

Le succès grandissant des smartphones et des tablettes va conduire à multiplier les synergies entre la télévision et le Web, rompant à la fois avec la diffusion linéaire et la consommation passive. Avec une diffusion multisupport et l’engagement de communautés d’internautes, la télévision sociale constitue un outil marketing performant. Elle contribue à renforcer la notoriété d’une marque grâce à la fidélisation des consommateurs qui deviennent ses prescripteurs les plus efficaces.

Encore au stade des balbutiements, la « socialisation des contenus », traduction de l’expression play along, présage des bouleversements à venir dans le secteur des programmes et de la publicité à la télévision. Elle offre dès à présent une expérience, pour le moins instructive, de ce que deviendra la télévision lorsqu’elle sera connectée (voir REM n°17, p.25), avec, en guise de télécommande, un téléphone portable ou une tablette effectuant le changement automatique de chaîne selon la recommandation TV des amis.

REM N°22-23, Printemps-été 2012

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