… l’ancien numéro deux mondial s’inscrit à nouveau au palmarès des principaux groupes mondiaux de médias

Avec le rachat d’Activision, le groupe Vivendi prend un nouveau visage, certes différent de ce qu’a pu être le groupe de communication jusqu’en 2002, mais qui fait du leader français des médias et de la communication une major de premier plan à l’échelle internationale. En effet, Vivendi, déjà numéro un mondial sur le marché du disque avec Universal Music Group, est également numéro un mondial sur le marché de l’édition musicale depuis le rachat des activités d’édition de BMG en septembre 2006, rachat confirmé en mai 2007 par la Commission européenne à la suite d’une longue enquête (voir le n° 4 de La revue européenne des médias, automne 2007). Numéro un mondial du jeu vidéo avec Activision, le groupe se caractérise par son positionnement atypique, ayant migré progressivement des contenus « traditionnels », presse, cinéma et télévision, vers des contenus aujourd’hui plébiscités par les usagers, notamment les jeunes internautes, qu’il s’agisse de la musique en ligne ou des jeux vidéo en ligne.

Si Vivendi s’impose sur le plan mondial comme major de la musique et du jeu vidéo, ses activités françaises rappellent les ambitions à plus long terme du groupe. En effet, Vivendi détient le groupe Canal+, qui s’est imposé comme l’unique éditeur de télévision payante en France depuis le rachat de TPS, effectif depuis le 4 janvier 2007 (voir le n° 1 de La revue européenne des médias, hiver 2007). Par ailleurs, le groupe est présent dans le secteur très lucratif de la téléphonie mobile avec une participation de 56 % dans le capital de SFR, lequel contrôle actuellement 40,5 % du capital du deuxième fournisseur d’accès à Internet en France, le groupe Neuf Cegetel.

Vivendi ambitionnant de se renforcer sur le marché français, SFR annonçait, le 20 décembre 2007, un accord avec le groupe Louis Dreyfus, qui détient 29,5 % du capital de Neuf Cegetel, pour lui racheter sa participation et engager par la suite une offre publique d’achat sur le reste du capital flottant de Neuf Cegetel. Cette opération, dont le coût total est estimé à 4,45 milliards d’euros, fera de SFR le seul véritable concurrent de France Télécom sur le marché français des télécommunications. Par ailleurs, cette opération se veut stratégique. A l’heure de la convergence entre fixe et mobile, notamment avec les offres quadruple play, la fusion du numéro deux français du mobile et du numéro deux français de l’accès à Internet permet de proposer une offre de services globale et intégrée aux abonnés du groupe.

Sur ce point, la stratégie de convergence autour d’un parc d’abonnés rappelle, dix ans plus tard, les choix de l’ancien parton de Vivendi, Jean-Marie Messier, qui comptait faire de son groupe un modèle d’intégration multimédia.

En effet les activités les plus lucratives de Vivendi reposent toutes sur la gestion d’abonnés, qu’il s’agisse des 18 millions d’abonnés de SFR et des 3,5 millions d’abonnés de Neuf Cegetel dans les télécommunications, ou des 10,3 millions d’abonnés de Canal+ dans l’audiovisuel et des 9,3 millions d’abonnés de World of Warcraft dans le jeu vidéo.

L’objectif d’une offre de services globale et intégrée, valorisé par Jean-Marie Messier, qui ambitionnait de proposer tous les contenus sur « tous les écrans de notre vie », semble donc de nouveau cohérent. En effet, au-delà des offres d’accès intégrées, dites quadruple play (Internet, téléphonie fixe et mobile, télévi- sion), Vivendi teste actuellement la possibilité d’une offre de contenus en ligne regroupant autour d’un seul portail l’accès à l’ensemble des médias. Cette offre, présentée pour l’instant comme complémentaire aux activités médias et télécommunications de Vivendi, rappelle pourtant ce qu’a pu être le portail Vizzavi, lancé en juin 2000, lequel a symbolisé l’échec de la stratégie de convergence de Vivendi à l’occasion de l’explosion de la bulle spéculative autour des valeurs technologiques dès le printemps 2001.

Baptisé Zaoza et lancé à titre expérimental le 21 novembre 2007, le nouveau portail multimédia et multi-plateforme (PC, téléphone mobile) de Vivendi propose l’accès à une gamme élargie de contenus, musique, sonneries pour portable, films, dessins animés, jeux vidéo. En cohérence avec la stratégie du groupe, l’accès au portail Zaoza passe par un abonnement, entre 3 et 5 euros par mois, en échange de quoi les utilisateurs pourront puiser à volonté dans les catalogues, les œuvres étant protégées par des DRM (Digital Rights Management). Par ailleurs, l’offre se veut réellement multimédia : elle propose certes une gamme de contenus tous médias, mais en permet l’accès indifféremment depuis un PC ou un mobile, alors que les transferts de contenus entre ces deux supports sont encore aujourd’hui difficiles, voire impossibles. Autant dire que Zaoza ambitionne d’être au multimédia mobile et aux offres multimédias permises à terme par le très haut débit par fibre optique ce que peut être Canal+ pour la télévision payante, une offre valorisée par la richesse de ses contenus, lesquels justifient un paiement aux yeux du consommateur. Ambitieux, le projet sera étendu à l’Europe dès l’été 2008 avec un lancement sur les marchés britannique et allemand, et au Maroc début 2009 où Vivendi contrôle l’opérateur historique de télécommunications Maroc Telecom.

Sources :

  • « Vivendi lancera cet automne un nouveau portail multi- média », Jean-Christophe Féraud et Guillaume de Calignon, Les Echos, 25 mai 2007.
  • « Vivendi lance le portail Zaoza pour PC et mobile », Isabelle Repiton, La Tribune, 22 novembre 2007.
  • « Vivendi lance un portail de contenus payants », J.H., Les Echos, 22 novembre 2007.
  • « Vivendi : les métamorphoses de la convergence », Patrick Lamm, Les Echos, 19 décembre 2007.
  • « SFR et Vivendi se sont décidés à racheter Neuf Cegetel », G.C., Les Echos, 19 décembre 2007.
  • « SFR prend le contrôle de Neuf Cegetel pour 4,45 milliards d’euros », Cécile Ducourtieux, Le Monde, 21 décembre 2007.
Alexandre Joux, directeur de l'Ecole de journalisme et de communication d'Aix-Marseille (EJCAM), Aix-Marseille Université, IRSIC (Institut de recherche en sciences de l'information et de la communication)

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