Hongrie : la loi sur les médias à peine assouplie

Aides financières contre changements politiques : l’Europe menace le Premier ministre hongrois.

Votée en décembre 2010 et entrée en vigueur en juillet 2011 à la suite de quelques correctifs (voir REM, n°20, p.7), la loi sur les médias, très controversée dans le pays mais aussi par les instances européennes, a fait l’objet d’un amendement approuvé, par 257 voix contre 51, le 11 mai 2011. Entré en vigueur le 31 mai 2012, cet amendement concerne la garantie du secret journalistique. Il fait suite à l’arrêt de la Cour constitutionnelle de Hongrie du 19 décembre 2011 reconnaissant aux journalistes le droit de protéger leurs sources. Contrairement à ce que prévoyait jusqu’alors la loi sur les médias, ceux-ci ne seront donc plus dans l’obligation de dévoiler leurs sources, y compris s’ils ne sont plus en poste.

En outre, dans sa version initiale, cet amendement accordait la possibilité à l’instance de régulation NMHH de ne pas exécuter une décision de justice favorable à l’unique radio d’opposition Klubradio. Sixième en termes d’audience, deuxième radio généraliste, Klubradio, déjà privée du droit d’émettre dans diverses régions de Hongrie, était menacée de perdre, le 1er mars 2012, sa principale fréquence à Budapest où elle compte 500 000 auditeurs, au profit d’une jeune radio inconnue, Autoradio. Soutenu par des manifestations de milliers d’auditeurs dans la capitale en décembre 2011 et en janvier 2012, Andreas Arato, le président-fondateur, avait porté l’affaire devant la justice, dénonçant un processus opaque d’appel d’offres pour l’attribution des fréquences. En mars 2012, la cour d’appel de Budapest a invalidé la décision du Conseil des médias, en jugeant le dossier d’Autoradio invalide pour vice de forme, et a redonné sa fréquence d’origine à Klubradio, confirmant une première décision de justice de février 2012 ayant permis à la radio d’opposition de récupérer entre-temps une autre fréquence dans la capitale. Symbole de la liberté d’expression en Hongrie, la radio a perdu une bonne partie de ses sources de financement, annonceurs publics mais aussi privés.

La récente modification de la législation hongroise est modeste au regard des pouvoirs de contrôle dont dispose le Conseil des médias, organe exécutif de la NMHH, dont les membres appartiennent au parti du pouvoir en place. L’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), qui a porté à maintes reprises des jugements très sévères à l’encontre de la loi hongroise, a estimé que cet amendement n’empêchait pas la loi de menacer le pluralisme et d’instaurer un contrôle politique sur les médias. En mars 2012, le secrétaire général du Conseil de l’Europe, le Norvégien Thorbjoern Jagland, était venu présenter au chef du gouverne- ment, Viktor Orban, les conclusions de la Commission européenne pour la démocratie par le droit, appelée Commission de Venise, portant sur le système judiciaire et les médias hongrois. Estimant que « des organisations, voire des personnes, concentrent trop de pouvoir à la tête de ces systèmes », il a indiqué que l’Union européenne suivrait les conclusions du Conseil de l’Europe, au moment où Budapest a adressé une demande d’aide financière d’un mon- tant de 15 à 20 milliards d’euros.

Sources :

  • « Hongrie : la radio d’opposition Klubradio ne se rendra pas sans combattre », AFP, tv5.org, 18 janvier 2012.
  • « Hongrie : la commissaire européenne Neelie Kroes écrit au gouvernement pour lui faire part de sa « préoccupation » concernant la liberté et le pluralisme des médias », La Correspondance de la Presse, 19 janvier 2012.
  • « Hongrie: la radio d’opposition Klubradio retrouve sa fréquence », AFP, lexpress.fr, 14 mars 2012.
  • « Hongrie : trop de pouvoir concentré à la tête des médias et de la justice, estime le Conseil de l’Europe », AFP, tv5.org, 21 mars 2012.
  • « Hongrie : le Parlement adopte une version plus souple de la loi controversée sur les médias », La Correspondance de la Presse, 30 mai 2012.

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