Culture-acte 2, mission « Acte II de l’exception culturelle »

Neuf mois après qu’il lui a été demandé, Pierre Lescure remettait au président de la République, le 13 mai 2013, son rapport sur « l’Acte II de l’exception culturelle ». Soucieux d’adapter les politiques culturelles au numérique, le rapport, qui ne compte pas moins de 700 pages et 80 propositions, entend couvrir le domaine bigarré des industries culturelles, dites « créatives », qui vont de la musique au cinéma en passant par les services d’Internet. Après avoir souligné l’opportunité que représente le développement des technologies et des services numériques pour les créateurs et pour les industries culturelles, le rapport ouvre plusieurs pistes de réformes, toutes inspirées par la nécessité de tirer parti de ce développement sans déroger aux principes de l’exception culturelle à la française. Ainsi, le rapport recommande d’assouplir la chronologie des médias : ramener de 4 à 3 mois après la sortie en salle du film l’autorisation de son exploitation en VAD payante à l’acte ou la location en DVD, de 3 ans à 18 mois le délai pour la vidéo par abonne- ment, interdire le gel de la VAD pendant les diffusions télévisées.

Le rapport ouvre une deuxième piste en recommandant le maintien du système de rémunération de la copie privée. Afin d’éviter l’affrontement entre les ayants droit et les industriels, il souhaite faire entrer des représentants de l’Etat au sein de la commission de la copie privée, tout en soulignant que le mode de calcul de cette taxe, qui fait figure d’exception au droit d’auteur, est parfaitement juste. Le rapport préconise d’étendre cette taxe aux services d’informatique en nuage (cloud computing), en plus par conséquent des supports physiques, afin de prendre en compte la pratique de ces formes nouvelles de distribution des contenus.

Estimant que les bibliothèques françaises « peinent à proposer à leur usagers une offre numérique large, variée et cohérente », constatant également l’absence d’un cadre juridique pour « le prêt numérique », le rapport invite ensuite les éditeurs (livres, musique, jeux vidéo et cinéma) à instituer pour les bibliothèques une gestion collective volontaire avec une offre « claire, transparente et non discriminatoire […] en direction des bibliothèques ».


Enfin, plus spectaculairement, et comme le souhaitait notamment le Parti socialiste, le rapport propose la suppression de la Hadopi. Il maintient la riposte graduée, exclut la dépénalisation du piratage ainsi que la licence légale et supprime la coupure de l’accès à Internet, remplacée par une amende de 60 euros. La mise en œuvre de la riposte graduée est confiée au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). Dans le même temps, la promotion des offres légales doit être encouragée : ainsi, les fournisseurs d’accès à Internet sont tenus d’offrir à leurs clients tous les sites de VAD et de VADA ayant signé des conventions avec le CSA et les sites du secteur public.

Les six organisations professionnelles des fabricants et sites de vente en ligne de matériels électroniques et numériques, démissionnaires de la Commission copie privée, ont estimé, dès le lendemain de la remise du rapport, que « ces nouvelles fonctions fiscales vont inciter les consommateurs à acheter toujours plus leurs matériels à l’étranger, constituant […] un manque à gagner pour l’Etat (pertes de TVA), pour les distributeurs nationaux (nombreux emplois menacés) et pour les ayants droit ». Dénonciation à laquelle le rapport semble riposter par avance, considérant « légitimes que ceux qui fabriquent et distribuent ces équipements – appareils connectés comme ordinateurs, téléphones, tablettes, télévisions, consoles, etc. – contribuent au financement de la création ».

Culture-acte 2, mission « Acte II de l’exception culturelle », contribution aux politiques culturelles à l’ère du numérique, Pierre Lescure, tome 1 et tome 2, culturecommunication.gouv.fr, mai 2013

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