Droits d’auteur : fin de la riposte graduée aux États-Unis

Le 27 janvier 2017, le Centre for Copyright Information (CCI) a annoncé la fin de la riposte graduée à l’américaine, le Copyright Alert System (CAS). Tandis que le puissant lobby du droit d’auteur en appelle à Donald Trump.

Le communiqué du CCI précise : « Après quatre années d’éducation et d’engagement auprès des consommateurs, le Système d’alerte au droit d’auteur conclura son travail. Le programme a démontré que de réels progrès sont possibles lorsque les créateurs de contenus, les innovateurs d’internet et les défenseurs des consommateurs se rassemblent dans un processus collaboratif et axé sur le consensus. Le CAS a réussi à éduquer beaucoup de gens sur la disponibilité des contenus légaux, ainsi que sur les questions liées à la contrefaçon en ligne. »

Le CCI est né en 2013 à la suite d’un accord entre partenaires privés : les fournisseurs d’accès internet – Altice, Comcast et AT&T, Charter Communications et Verizon –, la MPAA (Motion Picture Association of America) qui représente les intérêts des majors et la RIAA (Recording Industry Association of America) pour l’industrie du disque. Depuis cette date, les internautes américains qui téléchargeaient de façon illégale des œuvres protégées par le droit d’auteur pouvaient recevoir jusqu’à six avertissements, avec la menace d’un ralentissement du débit de leur accès internet, mais sans coupure du service, assortie de l’obligation de suivre une leçon sur les méfaits du piratage sous la forme d’une vidéo de 10 minutes. La mise en place de ce système est partie du principe que de nombreux consommateurs ignoraient télécharger des contenus piratés et qu’ainsi, une fois informés, ils cesseraient.

Vice-président exécutif et conseiller juridique à la MPAA, Steven Fabrizio justifie lui-même l’arrêt du Copyright Alert System, version américaine de la riposte graduée : « En fait, environ 981 millions de films et d’émissions de télévision ont été téléchargés aux États-Unis l’année dernière en utilisant le P2P ». Il considère que le système d’alerte a effectivement permis de dissuader un nombre important d’utilisateurs qui ont cessé de télécharger illégalement, mais qu’il n’a guère prouvé son efficacité face « aux pirates à répétition ». Datant de 2014, le dernier bilan sur l’action du CCI indique qu’au cours des dix premiers mois du programme, 3 % seulement des alertes envoyées, sur un total de 1,3 million, ont atteint le 6e avertissement. À l’instar de l’Hadopi en France, le système mis en place par le CCI s’applique uniquement à la piraterie P2P, alors que la violation du droit d’auteur passe désormais par des plates-formes de streaming, procédé qui est hors de ses compétences.

Néanmoins, The Copyright Alliance, puissant lobby du droit d’auteur, reste très mobilisé contre le piratage. Cette organisation représente environ 1,8 million de créateurs individuels et plus de 13 000 organisations américaines telles que, notamment, la Motion Picture Association of America, Directors Guild of America, National Music Publishers’ Association, Association of American Publishers, Newspaper Association of America, National Association of Broadcasters, Software and Information Industry Association ou encore Entertainment Software Association. Dans un courrier adressé fin janvier 2017 au tout nouveau président Donald Trump, la Copyright Alliance rappelle notamment que les industries du copyright au sens large – secteurs de la culture, de l’information et de l’informatique confondus – apportent au PIB américain 1 200 milliards de dollars ; qu’elles comptent près de 5,5 millions d’emplois et génèrent 177 milliards de chiffre d’affaires à l’exportation, dépassant les secteurs de la chimie, de l’agriculture, de l’aérospatial et des produits pharmaceutiques.

Et d’ajouter : « Votre slogan de la campagne présidentielle était « Make America Great Again. » Une des meilleures façons d’accomplir cet objectif est de donner le pouvoir aux créateurs américains d’innover et de lancer de petites entreprises. Le droit d’auteur est une forme de propriété sans équivalent qui est reconnue par la Constitution – Article 1, Section 8, Clause 8 – et il est basé sur la créativité, le travail acharné et le talent de l’individu. De bien des façons, il incarne le rêve américain. » Ainsi, la Copyright Alliance en appelle au soutien de l’État américain en faveur d’« un système de droits d’auteur solide et dynamique qui en protège les détenteurs contre le vol en ligne et garantit aux créateurs leur part des énormes profits réalisés par les plates-formes internet grâce aux œuvres protégées ».

Sources :

  • « Statement on the Copyright Alert System », Centre for Copyright Information, copyrightinformation.org, January 31, 2017.
  • « Copyright Alliance CEO Urges President Trump to Support U.S. Copyright Protections that Drive the Economy and Jobs », press release, Copyright Alliance, copyrightalliance.org, January 31, 2017.
  • « Téléchargement illégal : les États-Unis abandonnent leur « Hadopi » », 01net.com, 31 janvier 2017.
  • « Les États-Unis enterrent leur riposte graduée inspirée de l’Hadopi française », Elisa Braun, LeFigaro.fr, 1er février 2017.

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