Accords fiscaux : Google signe avec la France et l’Australie

En concluant un accord avec les autorités fiscales, Google solde à bon compte ses contentieux sans avoir à reconnaître sa culpabilité, une situation qui souligne l’importance de la réforme de la fiscalité internationale.

S’ils doivent faire face aux autorités de concurrence, le groupe Alphabet et sa filiale Google parviennent à solder progres­sivement leurs contentieux avec les administrations fiscales. En France, l’État portait plainte en 2015 contre Google pour « fraude fiscale aggravée » et « blanchiment en bande organisée de fraude fiscale aggravée ». Google était accusé d’avoir échappé en grande partie à l’impôt sur la période 2011-2015, et de devoir ainsi 1,6 milliard d’euros à l’État français. Finalement, le groupe se verra soumis à un redressement fiscal de 1,15 milliard d’euros que le tribunal administratif de Paris a annulé le 12 juillet 2017. Le tribunal a en effet considéré que Google n’a pas d’établissement stable en France, les bénéfices devant donc être majoritairement taxés en Irlande, le siège social du groupe en Europe (voir La rem n°44, p.19). Depuis, la France, avec sa taxe Gafa et, surtout, son soutien à la réforme de la fiscalité internationale au sein de l’OCDE, tente par tous les moyens de rendre de nouveau possible la taxation des géants du numérique dans les pays où ils réalisent l’essentiel de leur activité commerciale (voir La rem n°49, p.28).

Le jugement de 2017 ne signait pas la fin des ennuis fiscaux pour Google en France, notamment parce que le Conseil d’État, qui avait été saisi, pouvait reconnaître in fine l’existence d’un établissement stable en France. Bien qu’il ait échappé à son redressement fiscal, Google avait donc tout intérêt à solder ses comptes avec le fisc, ce à quoi il est parvenu le 12 septembre 2019, un accord ayant été annoncé avec le Parquet national financier. Cet accord, qui relève d’une transaction, et non d’un jugement reconnaissant la culpabilité de Google, a été rendu possible par l’évolution de la loi française. En 2016, la loi Sapin 2 créait la Convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) qui, d’inspiration américaine, permet de transiger avec l’admi­nistration pour éviter un procès en échange d’une forte compensation (voir La rem n°41, p.13). En 2018, la loi anti-fraude étend aux fraudes fiscales la possibilité de recours à la CJIP. C’est ce qui permettra l’accord entre Google et le fisc français. Une convention d’intérêt public met fin à l’enquête fiscale diligentée contre Google en échange de 500 millions d’euros. Par ailleurs, une transaction fiscale entre Google et la Direction générale des finan­ces publiques (DGFiP) solde les arriérés fiscaux de 2005 à 2018, Google versant 465 millions d’euros.

En tout, Google paie presque un milliard d’euros pour régulariser sa situation fiscale en France, un montant très proche du redressement qui lui avait été imposé. Mais le groupe américain est gagnant et a su exploiter au mieux la décision du tribunal administratif de Paris de 2017. Alors que le redressement portait sur la période 2011-2015, Google solde ses comptes avec le fisc sur une période presque trois fois plus longue pour un montant légèrement inférieur. Par ailleurs, Google n’est pas reconnu coupable et ne recon­naît pas l’existence d’un établissement stable en France. Il risque toutefois de payer un peu plus d’impôts en France puisque l’accord avec la DGFiP suppose que des bénéfices auraient dû faire l’objet, sans nul doute, d’une imposition en France. Faute d’un accord à l’OCDE, Google pourra donc continuer de dire au fisc français la part des bénéfices qu’il accepte de voir taxer dans l’Hexagone.

La même logique a été déployée en Australie où Google était en conflit avec l’administration fiscale. Alors que Google a un bénéfice estimé à 1,2 milliard par an en Australie, il n’y paye pas ou peu d’impôts parce que ces derniers sont taxés à Singapour, l’équivalent en Asie du Sud-Est de ce que l’Irlande est à l’Europe. Finalement, Google a accepté, en décembre 2019, de verser 481 millions de dollars australiens, soit 295 millions d’euros, afin de solder ses contentieux fiscaux sur la période 2008-2018.

Sources :

  • « Google paie près de 1 milliard d’euros pour solder ses contentieux en France », Valérie de Senneville, Les Echos, 13 septembre 2019.
  • « Impôts : Google règle 1 milliard à l’Etat », G.G., Le Figaro, 13 septembre 2019.
  • « L’accord avec Google est-il une si bonne affaire pour l’Etat ? », Ingrid Feuerstein, Les Echos, 9 octobre 2019.
  • « Google va verser près de 300 millions d’euros au fisc australien », Grégory Plesse, Les Echos, 19 décembre 2019. 

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