Fermes de serveurs : OVH, le leader européen

Créé en 1999 par Octave Klaba, le premier hébergeur de sites web en Europe est français, son siège social est à Roubaix.

L’entreprise OVH fit parler d’elle pour la première fois en 2010, à l’occasion de l’affaire WikiLeaks, alors qu’elle hébergeait, sans le savoir, une partie des documents secrets de l’administration américaine rendus publics par le site du militant Julian Assange. Simple prestataire technique, OVH n’avait pas été inquiété par la justice.

Disposant d’un réseau en fibre optique d’une capacité totale de 2,1 térabits par seconde implanté en Europe, en Amérique du Nord et en Asie, OVH (initiales de « On vous héberge ») compte onze fermes de serveurs dont trois à Paris et quatre à Roubaix, auxquelles s’ajouteront celle de Gravelines, près de Dunkerque, qui ouvrira courant 2013, et deux autres prévues sur son site de Strasbourg. Dix ans après l’installation de ses premiers serveurs dans les locaux d’un sous-sol parisien prêtés par Xavier Niel, patron de Free, OVH est devenu le numéro 1 européen de l’hébergement informatique en 2011.

L’entreprise a exporté son savoir-faire sur le marché nord-américain en ouvrant, en mai 2012, un premier data center à Beauharnois, près de Montréal, qui pourra héberger à terme 360 000 serveurs. Elle en construira prochainement un second au même endroit. OVH assure le fonctionnement de 145 000 serveurs qui abritent les données de 18 millions de sites web et gère environs 3 millions de noms de domaine. Elle compte plus de 700 000 clients. Avec une croissance annuelle supérieure à 35 %, OVH atteindra un chiffre d’affaires de 200 millions d’euros en 2013. En 2015, OVH emploiera 1 000 salariés contre 600 en mars 2013 et devrait compter un million de serveurs dans quatre ans.

Depuis l’origine, l’entreprise fondée et dirigée par une famille d’immigrés polonais compte avant tout sur ses propres moyens pour assurer son développement. Elle fabrique elle-même ses serveurs – 4e fabricant européen, elle en vend 300 à 400 par jour – et conçoit l’architecture de ses centres de données. A l’image de Roubaix 4 ouvert en 2011, les plus modernes sont équipés d’un système de refroidissement à eau complété de ventilateurs sur ses façades intérieures, plutôt que de recourir à la climatisation plus consommatrice d’énergie. OVH a même été jusqu’à investir dans la production d’énergie avec un parc d’éoliennes en Lorraine. Avec des coûts de fabrication dix fois moins élevés que ceux des concurrents – les data centers les plus récents sont construits, comme ceux de Google, avec des conteneurs – et une grande maîtrise de la consommation d’énergie, OVH peut maintenir pour ses services des tarifs de 20 % à 30 % inférieurs à ceux du marché. La recherche et développement occupe un quart de son effectif total.

Avec seize filiales, en Europe, en Amérique du Nord et en Afrique du Nord, OVH a considérablement étendu sa gamme de services, de la gestion de noms de domaine, à l’hébergement mutualisé, aux serveurs dédiés, à la téléphonie, à l’accès à Internet, à l’informatique en nuage, à la création de sites et à la formation. Encore en phase de test, le groupe offrira prochainement, aux particuliers comme aux entreprises, un accès masqué sur Internet via un réseau privé virtuel (VPN, Virtual Private Network). En mars 2013, OVH a obtenu l’accord de dix banques (BNP Paribas, Crédit Agricole, HSBC…) pour un financement à hauteur de 140 millions d’euros afin de poursuivre son développement en Europe et en Amérique du Nord au cours des deux années à venir.

Le marché mondial de l’hébergement informatique est grandement dominé par les grands groupes américains, Amazon, Google, Microsoft ou IBM, que la législation américaine (Patriot Act) contraint, le cas échéant, à fournir les informations stockées sur leurs serveurs, y compris hors des Etats-Unis, à la demande des pouvoirs publics. Dans le cadre du développement d’un « cloud souverain » (projet Andromède) visant à rendre indépendantes les administrations et les entreprises françaises vis-à- vis des Etats-Unis, curieusement le groupe OVH n’a pas participé à l’appel d’offres organisé par les pouvoirs publics. En 2012, le choix du gouverne- ment français s’est porté sur les tandems SFR-Bull (société Numergy) et Orange-Thales (société Cloudwatt), qui se partageront les 150 millions d’euros apportés par la Caisse des dépôts qui devient actionnaire à hauteur de 33 % des deux sociétés nouvellement créées. Cette décision a été commentée par Octave Klaba qui précisait qu’à service équivalent, OVH coûtait environ huit fois moins cher que les industriels sélectionnés. En attendant de construire leurs propres dizaines de fermes de serveurs nécessaires à la création de l’informatique en nuage français, ces industriels loueront les infrastructures requises. A OVH ?

Sources :

  • www.ovh.com
  • « OVH, l’Internet giga familial », Christophe Alix, Libération, 14 février 2012.
  • « La famille Klaba règne sur l’hébergement de sites internet », Nicole Buyse, Les Echos, 29 août 2012.
  • « Le groupe français OVH lève 140 millions d’euros auprès des banques », Les Echos, 12 mars 2013.
  • « L’hébergeur OVH.com poursuit son développement », Nicole Buyse, Les Echos, 14 mars 2013.
  • « OVH, la face cachée de l’Internet français », Julien Dupont-Calbo, cahier Eco& entreprise, Le Monde, 23 avril 2013.
Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

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