L’EICTA (European Information and Communications Technology Industry Association), l’association européenne qui regroupe les fabricants de l’audiovisuel et de la téléphonie comme Alcatel, Nokia, Sony ou encore Philips, n’est pas encore parvenue à ses fins. Après une campagne critique contre la redevance compensatoire à l’exception de copie privée, appliquée dans 20 des 25 pays de l’Union européenne (27 depuis le 1er janvier 2007), les industriels de l’électronique avaient en effet obtenu de la Commission européenne qu’elle se penche sur ce dossier. Une recommandation de la Direction du marché intérieur et des services, préparée par le commissaire Charlie Mc Greevy, devait demander aux Etats membres de supprimer les dispositifs de redevance. Le développement de la gestion numérique des droits d’auteurs (Digital Right Management-DRM) était présenté à cette occasion comme un moyen de résoudre le problème de la copie privée, rendant ainsi caduque la compensation prévue pour l’exception de copie privée. Mais les associations d’ayants droit, qu’il s’agisse du GESAC (groupement européen des sociétés d’auteurs et de compositeurs), d’Impala (labels musicaux indépendants) ou encore d’Eurocinema (association des producteurs de cinéma et de télévision), regroupés depuis le 18 octobre 2006 dans l’alliance « Culture d’abord », ont obtenu de José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, le report à 2007 de l’examen de cette recommandation.
Pour les industriels, ce report, annoncé le 12 décembre 2006, une semaine avant l’examen prévu de la recommandation, équivaut à un abandon du projet. C’est du moins ce qu’a affirmé le CLRA (Copyright Levies Reform Alliance), une coalition d’industriels spécialement créée le 5 avril 2006 pour dénoncer le dispositif de redevance pour copie privée. En réaction, le CLRA compte porter plainte au- près de la Commission européenne contre plusieurs Etats membres où la redevance prélevée à l’achat sur les matériels autorisant la reproduction des œuvres (lecteurs MP3, graveurs, supports vierges, photocopieuses …) est jugée trop élevée et sans véritable efficacité. Les Etats concernés sont la France, à qui la CLRA reproche une mauvaise transposition de la directive sur les droits d’auteur (EUCD – European Union Copyright Directive du 22 mai 2001), l’Allemagne et l’Espagne. Le CLRA considère que les taxes ainsi prélevées représentent sur le plan européen 1,57 mil- liard d’euros en 2006, et passeront à 2,12 milliards d’euros en 2009. En effet, avec le développement des lecteurs MP3 sur les téléphones mobiles, ce sont des millions d’appareils qui vont être concernés à terme par la redevance pour copie privée.
Les artistes et producteurs contestent ces chiffres et insistent à l’inverse sur le fait que les DRM n’empêcheront pas la circulation illégale des œuvres protégées. Enfin, ils mettent en avant l’engagement de l’Union européenne en faveur de la diversité culturelle pour préserver le principe de la redevance.
Sources :
- « Les industriels des technologies de l’information et des media numériques plaident en faveur d’une réforme des “taxes technologiques” en Europe à l’occasion de la création de la “Copyright Levies Reform Alliance” (CLRA) », Communiqué de presse CLRA, 5 avril 2006.
- « Menaces sérieuses sur la copie privée », S. Dr., Le film français, 27 octobre 2006.
- « L’avenir de la rémunération pour copie privée en jeu à Bruxelles », Karl de Meyer, Les Echos, 19 octobre 2006.
- « Bruxelles divisé sur la copie privée », E. T., Le Figaro, 9 novembre 2006.
- « Bruxelles reporte sine die l’adoption d’un texte sur la copie privée », Les Echos, 12 décembre 2006.
- « Copie privée : les industriels repassent à l’attaque », Karl de Meyer, Les Echos, 14 décembre 2006.