En Espagne, le financement du cinéma par les chaînes de télévision privées fait débat

En proposant une réforme de la « loi cinéma » qui porterait de 5 % à 6 % des recettes brutes la part que les chaînes privées espagnoles doivent consacrer à la production cinématographique nationale, le ministre espagnol de la culture, Carmen Calvo, a déclenché une véritable polémique sur la santé du cinéma espagnol et l’efficacité de son mode de financement par la télévision privée. En effet, les chaînes privées Antena 3, Tele 5 et Sogecable (Cuatro, Digital +), ainsi que les nouvelles chaînes de la TNT, VeoTV et NetTV, réunies dans l’association patronale Uteca, ont reproché au ministère de la culture de les forcer à financer le cinéma espagnol, « une activité privée et indépendante du secteur audiovisuel », dans laquelle elles ont déjà investi plus de 800 millions d’euros depuis que l’obligation de financement a été introduite en 1999.

Uteca demande la suppression de la « taxe de 5 % » et dénonce l’inefficacité de cette aide à la production cinématographique nationale. A l’évidence, le cinéma espagnol n’est pas en bonne santé : en 2006, il a attiré 15 millions de spectateurs sur son marché national et généré 80 millions d’euros de recettes, loin derrière le cinéma américain qui a attiré 76 millions de spectateurs espagnols et généré 399 millions d’euros de recettes. La faiblesse du cinéma espagnol, malgré des réussites mondiales comme celle de Volver de Pedro Almodovar, résiderait pour certains dans le trop grand nombre de films produits, 148 en 2006, un chiffre qui a presque doublé en sept ans, depuis l’introduction de l’obligation d’investissement des chaînes dans la production cinématographique nationale. En définitive, sur ces 148 films, 5 seulement ont attiré plus d’un million de spectateurs alors que 75 % d’entre eux ont été vus par moins de 100 000 spectateurs. De la même manière, le cinéma espagnol à la télévision est en recul, d’abord parce que la programmation des chaînes mise moins sur le cinéma, ensuite parce que, sur les 500 plus grandes audiences des films en 2006, seules 40 l’ont été avec des films espagnols, l’Uteca précisant d’ailleurs que 33 d’entre eux dataient de plus de 30 ans.

Source :

  • « Les télévisions privées espagnoles refusent de financer davantage le cinéma espagnol », José Alves, Les Echos, 1er mars 2007.
Professeur à Aix-Marseille Université, Institut méditerranéen des sciences de l’information et de la communication (IMSIC, Aix-Marseille Univ., Université de Toulon), École de journalisme et de communication d’Aix-Marseille (EJCAM)

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