L’UK Film Council disparaît

Comme d’autres établissements publics voués à la culture, y compris le ministère qui en a la charge, l’organisme de financement du cinéma britannique est victime des coupes budgétaires.

Le film britannique réalisé par Danny Boyle, primé dans de nombreux festivals en 2008, Slumdog Millionaire, n’aurait peut-être pas vu le jour sans le financement du UK Film Council (UKFC). En dix ans, cet organisme public britannique aura financé plus de 900 films, participant largement au renouveau du cinéma britannique.

En juillet 2010, le gouvernement britannique a annoncé la suppression du Conseil du film britannique créé par l’ancien Premier ministre Tony Blair en 2000 pour développer et promouvoir l’industrie britannique du cinéma. Une décision prise « sans aucune consultation ou évaluation », comme le déplore son actuel et dernier président, Tim Bevan. Doté d’un budget de fonctionnement de l’ordre de 15 millions de livres (18 millions d’euros), l’UKFC emploie 75 personnes. Financé par l’argent de la loterie nationale, il a consacré, durant les dix dernières années, près de 160 millions de livres au financement de superproductions et à celui de films d’art et d’essai, de clips ou de spots publicitaires. De même, il est à l’origine du Digital Screen Network qui a investi dans l’équipement numérique de 240 salles de cinéma à travers le pays, classant la Grande-Bretagne parmi les pays possédant le plus important parc numérique d’Europe.

Selon son directeur John Woodward, l’UKFC tiendra néanmoins ses engagements d’ici à la date de sa fermeture définitive prévue en avril 2012.

Le ministre de la Culture, des Médias et des Sports, Jeremy Hunt, a annoncé que les aides publiques au cinéma en provenance de la loterie nationale (26 millions de livres) et celles émanant du budget de l’Etat, en cours de discussion (25 millions de livres), seraient maintenues mais gérées par un autre organisme. Néanmoins, seize organismes publics dont le Conseil des musées, bibliothèques et archives (Museums, Libraries and Archives Council, MLA) vont perdre leur financement. Comme l’a expliqué le ministre de la Culture : « Le gouvernement s’est engagé à accroître la transparence et la responsabilité de ses établissements publics, tout en réduisant leur nombre et le coût. […] Nombre de ces organismes ont été mis en place il y a longtemps, et les temps comme les besoins ont changé. Les changements que je propose aujourd’hui devraient nous aider à offrir une culture, des médias et du sport sensationnels, tout en veillant à l’optimisation des ressources et à la transparence des dépenses de l’argent des contribuables ».

Le cinéma britannique est en émoi et une pétition d’opposition à cette décision gouvernementale a recueilli plus de 30 000 signatures. Ces opposants considèrent le projet hâtif et incohérent, l’UKFC venant justement de réaliser d’excellentes performances. En l’absence d’une décision concernant la réattribution des fonctions et des financements du UKFC à un autre organisme, le British Film Institute (BFI) en tant que fondation ne pouvant reprendre les activités de production cinématographique, les professionnels du cinéma craignent que le gouvernement ne consacre une partie des subventions attribuées aux arts au financement du volet culturel des Jeux olympiques de 2012. Le gouvernement a également l’intention de réduire considérablement les effectifs du ministère de la Culture, des Médias et des Sports.

Cependant, l’UKFC n’est pas exempt de critiques quant à son fonctionnement, jugé trop bureaucratique et particulièrement inadéquat à travers l’exercice d’un droit de regard sur le montage final (final cut), ou encore à cause d’un soutien trop marqué aux productions commerciales et exportables comme aux films de divertissement. Les professionnels de la culture proches du Parti conservateur lui reprochent également son manque de collaboration avec le secteur privé, et plus particulièrement avec les milieux financiers prêts à investir dans le cinéma.

En qualité de président et directeur général du MLA, Sir Andrew Motion et Roy Clare ont déclaré vouloir continuer d’offrir un service de qualité pour le public qui attend à juste titre d’excellents musées, bibliothèques et services d’archives près de chez eux. Et d’ajouter : « Stormy seas call for cool heads and steady hands ».

Sources :

  • « UK Film Council to be abolished », BBC News, bbc.co.uk, 26 july 2010.
  • « UK Film Council axed », Mark Brown and Maev Kennedy, guardian.co.uk, July 26th, 2010.
  • « La fin du UK Film Council provoque un tollé dans le cinéma britannique », Marc Roche, Le Monde, 5 août 2010.
Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

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