Présentant les principaux textes et la jurisprudence du droit européen (Union européenne et Conseil de l’Europe) en la matière, ce numéro de la collection IRIS de l’OEA est consacré à la question du financement de la radiodiffusion de service public, et plus particulièrement du contrôle de la performance des offres des radiodiffuseurs, du point de vue économique comme de celui des contenus. Outre la publicité ou la vente de programmes, de nouveaux modes de financement viennent aujourd’hui compléter la ressource historique du service public de radiodiffusion qu’est la redevance audiovisuelle. L’assujettissement à celle-ci des ordinateurs connectés à Internet est envisagé. De même, des taxes sur les recettes des diffuseurs privés et sur celles des opérateurs de télécommunications sont instaurées afin de compenser la suppression partielle ou l’absence de recettes publicitaires, comme c’est le cas, respectivement en France et en Espagne. Parallèlement au recours à de nouvelles sources de financement, le principe d’une redevance télévisuelle acquittée par les utilisateurs est en cours de discussion. Certains Etats membres envisagent une nouvelle approche : l’instauration d’une nouvelle imposition sous la forme d’une « contribution médias globale » ou d’une « redevance médias » qui s’ajouterait à la redevance applicable aux appareils en Allemagne, une « redevance générale pour les services de médias » qui remplacerait la redevance acquittée pour la possession d’un récepteur en Finlande, et aux Pays-Bas des subventions annuelles allouées directement sur le budget de l’Etat depuis l’année 2000, date de la suppression des redevances audiovisuelles.
Un autre sujet majeur fait aujourd’hui l’objet de débats en Europe. Il porte sur la définition du périmètre des services publics de médias à financer avec des fonds publics (voir le n°12 de La revue européenne des médias, automne 2009). Faut-il subventionner les nouveaux médias de service public ou doivent-ils être soumis aux seules lois du marché ? Autrement dit, quels sont les contenus qu’il convient de financer et selon quelles modalités ? Les modèles de financement des médias de service public d’une part, et, d’autre part, les mécanismes de surveillance de leurs financements et de contrôle de leurs prestations en matière de contenus (comme les tests d’évaluation de l’intérêt public baptisés « tests en trois étapes ») font l’objet dans cette publication d’une analyse détaillée à partir des situations diverses rencontrées dans les Etats membres. Quatre pays – l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Irlande et l’Autriche – ont été choisis pour leur caractère représentatif. A la suite de décisions rendues par la Commission européenne en matière de contrôle des aides d’Etat, ces pays ont déjà mis en œuvre, ou s’apprêtent à le faire, de nouvelles législations afin de permettre le contrôle du financement des radiodiffuseurs de service public, à travers des procédures ex ante et ex post, ainsi que le contrôle des contenus afférent, par des entités internes et externes. En outre, un tableau répertorie les nouveaux services de médias qui ont fait ou qui font l’objet d’un examen de conformité avec une mission de service public.
Le financement des services de médias dans le cadre des missions de service public est une question primordiale, aujourd’hui au centre des débats sur l’avenir du service public de la radio et de la télévision en Europe. L’article de Christian M. Bron, proposé en première partie de ce numéro d’IRIS plus, se termine en indiquant que « ces changements pourraient toutefois conduire à rendre les médias de service public plus fortement dépendants des décisions prises au niveau de l’Etat : en percevant (directement) le produit de la redevance et en s’appuyant sur des recettes issues de la publicité et du parrainage, les radiodiffuseurs de service public seraient protégés plus efficacement contre les tentatives d’ingérence (indirecte) du monde politique dans le contenu ou l’orientation des programmes ». Déterminer les moyens de financement des diffuseurs sur la base de leurs besoins réels, en confiant cette mission à un organisme indépendant, permettrait en l’occurrence de ne pas assujettir ces derniers aux aléas des finances publiques. Enfin, concernant le contrôle des finances et la performance des contenus des médias de service public, l’auteur rappelle qu’il ne faut pas oublier que « la fixation des moyens financiers, la définition de leur mode d’utilisation, ainsi que le contrôle de la gestion économique des radiodiffuseurs, n’autorisent en aucun cas l’ingérence dans l’autonomie des programmes ». Le droit européen d’une part, et les droits constitutionnels nationaux, d’autre part, reconnaissent l’autonomie de la programmation comme l’une des composantes de la liberté de diffuser des émissions de radio ou de télévision.
Médias de service public : pas de contenu sans financement, IRIS plus, 2010-4, Observatoire européen de l’audiovisuel, 59 p., obs.coe.int, juin 2010.