Fact-checking

(vérification des faits)

Pratique journalistique qui consiste à contrôler l’exactitude des informations ou la cohérence des propos délivrés par les hommes politiques. La multiplication des moyens de communication, et notamment la généralisation de l’usage des réseaux sociaux comme Facebook et Twitter, a pour conséquence de créer un flux continu d’informations en direct. Simultanément, le numérique offre la possibilité de stocker ces informations. Ainsi, grâce aux techniques numériques, des journalistes se sont fait une spécialité de suivre les discours des hommes politiques dans le temps afin d’en évaluer la cohérence ou la véracité. Contrairement à leurs prédécesseurs, les hommes politiques actuels sont soumis à un suivi médiatique de leurs discours confrontant argumentations et résultats de façon très documentée. Cette nouvelle donne au sein du débat politique, l’éditorialiste politique Thomas Legrand, la désigne comme étant « la tyrannie de la cohérence ».

Le fact-checking vient des Etats-Unis. Le site américain PolitiFact.com est un modèle du genre. Il édite un baromètre de la vérité, « Truth-O-Meter », accessible sur les smartphones et autres tablettes. Récompensée par un prix Pulitzer en 2009, cette application mesure la véracité des propos tenus selon une échelle allant de True, Mostly True, Half True, Mostly False, False, Pants on Fire. Un « Obameter » permet également de suivre l’état d’avancement de plus de 500 promesses faites par le président américain lors de la campagne présidentielle de 2008.

En France, le fact-checking a commencé à se développer à travers les sites d’information en ligne Rue89, Mediapart, Slate ou Arrêt sur images, nés de cette culture journalistique, moins complaisante avec la classe politique. La presse traditionnelle s’y convertit peu à peu. Le quotidien Libération tient une rubrique « Désintox. La parole des politiques soumise à contre-enquête », Le Journal du dimanche publie « Le détecteur de mensonge » dans une rubrique « Elysée 2012 », et Le Monde a lancé son blog « qui enquête avec les internautes » intitulé Les décodeurs. Journaliste au Monde.fr, Nabil Wakim invite les internautes à faire part de leurs interrogations soulevées par les propos tenus par des personnalités publiques « pour y démêler le vrai du faux (…) à partir de sources fiables et transparentes et d’interlocuteurs de référence ». En guise de preuve sont publiés sur ce blog des graphiques et des statistiques émanant d’organismes de référence venant infirmer les arguments avancés par les politiques.

Avec le fact-checking, les hommes politiques sont mis face à leurs promesses non-tenues et les journalistes face au principe élémentaire de leur profession, la vérification des faits. Pour faire éclore la vérité, la collaboration est souvent de mise dans la pratique du fact-checking, les journalistes de médias concurrents n’hésitant pas à travailler ensemble. C’est ainsi qu’a pu être démontré, par exemple, que le président de la République ne pouvait pas être à Berlin le 9 novembre 1989, au pied du Mur. Le fact-checking sera peut-être une pratique déterminante lors de la prochaine campagne présidentielle de 2012, si les rédactions des médias d’information se donnent les moyens de le pratiquer en direct, en temps réel. Certains hommes politiques en ont déjà fait l’expérience à leurs dépens lorsque, interviewés en direct sur un plateau de télévision, leurs propos ont été récusés à juste titre par des internautes spécialistes des sujets débattus, participant à un forum organisé pour l’occasion.

En bouleversant la communication politique, l’usage des outils numériques pourrait contribuer à raviver le débat démocratique entre hommes politiques d’un côté et journalistes de l’autre, souffrant pareillement d’un manque de crédibilité. Un retour aux sources.

Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

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