Ayant fait l’objet de très vives critiques au sein de l’Union européenne à la suite de son adoption par le Parlement hongrois en décembre 2010 (voir REM n°18-19, p.62), la loi sur les médias est entrée en vigueur le 1er juillet 2011. Si le texte a été quelque peu amendé pour le rendre plus conforme au cadre juridique européen au moment où la Hongrie assurait la présidence tournante de l’Union européenne, la nouvelle loi n’en reste pas moins liberticide aux yeux des opposants hongrois.
L’autorité de régulation NMHH, dotée d’un organe exécutif baptisé Conseil des Médias, dont les membres sont des sympathisants du Fidesz, le parti majoritaire au Parlement, détient d’importants pouvoirs de contrôle sur l’ensemble des médias publics et privés. Ainsi, le Conseil des médias, qui détient un droit de vie et de mort sur les entreprises du secteur public, peut également infliger de lourdes amendes et même aller jusqu’à ne pas renouveler les autorisations d’émettre des radios et télévisions privées, au motif que ces dernières ne remplissent pas leurs obligations, comme celle de consacrer 35 % de leur programmation aux œuvres nationales. La chaîne privée RTL Klub a été condamnée à payer une amende de 232 millions de forints (environ un million d’euros) pour la diffusion d’un programme traitant de la sexualité sans avertissement spécial destiné aux mineurs.
La presse d’opposition est également tombée sous le joug du Conseil des médias qui la condamne pour publication de propos hostiles envers le gouvernement ou le président de la République. En cas de non-paiement des amendes, des saisies sont effectuées sur les avoirs des entreprises de médias. Initialement, la loi permettait à la NMHH d’obliger les journalistes à révéler leurs sources sur des questions de sécurité et d’ordre public ; une modification du texte votée par le Parlement hongrois accorde désormais cette prérogative au tribunal ou à une autorité d’investigation. De menus aménagements qui ne suffisent guère à rassurer les quelques journalistes qui osent encore manifester leur opposition à la politique du gouvernement. Ils n’étaient pas plus de 250, par peur des représailles, le 13 juillet 2011 à manifester dans les rues de Budapest pour lutter contre la volonté gouvernementale de licencier 570 journalistes et techniciens du secteur public de l’audiovisuel travaillant pour les chaînes de télévision MTV et Duna TV, la radio publique et l’agence de presse MTI. Parmi les équipes remerciées se trouve celle chargée de la réalisation d’un magazine hebdomadaire et destiné à la minorité tzigane, diffusé sur la première chaîne publique. Une autre vague de licenciements de même ampleur devrait suivre à l’automne. Il s’agit pour le gouvernement de poursuivre sa réforme « d’assainissement » du secteur public de l’audiovisuel, jugé « hypertrophié », avec un effectif total de 3 000 employés, réforme à la faveur de laquelle l’ensemble des médias publics a été regroupé au sein de la holding MTVA dotée d’une rédaction unique. L’opposition parle, quant à elle, d’une « épuration politique ».
Sources :
- « Hongrie : modifications de la loi controversée sur les médias », AFP, tv5.org, 12 juillet 2011.
- « Hongrie : les libertés foulées par le pouvoir », Joëlle Stolz, Le Monde, 17-18 juillet 2011.