Encore enfants et déjà internautes, mobinautes et tablonautes

L a 13e vague du baromètre Orange–Terrafemina sur les pratiques des Français sur Internet s’attache à décrire celles des jeunes enfants. Sur un échantillon de 501 parents d’enfants de moins de 12 ans, 99 % des foyers interrogés sont équipés d’un ordinateur connecté à Internet, 65 % un smartphone, 35 % une télévision connectée, 30 % une tablette numérique et 5 % une liseuse (sondage réalisé en ligne par l’institut CSA, selon la méthode des quotas, entre le 10 et le 12 septembre 2012).

Parmi l’ensemble des équipements disponibles au sein de leur foyer, les jeunes enfants sont plus nombreux à jouer avec une tablette qu’avec un ordinateur ou un smartphone. Légère, malléable, dotée d’un grand écran, la tablette tactile est d’un usage intuitif, particulièrement ludique. Selon les déclarations de leurs parents, 71 % des enfants de moins de 12 ans utilisent déjà une tablette « fréquemment, et ils s’en servent presque aussi bien que des adultes » ou « de temps en temps, et ils savent assez bien s’en servir », 67 % une liseuse, 55 % un ordinateur, 51 % un téléviseur connecté à Internet et 43 % un smartphone. Près d’un tiers des enfants (30 %) se servent fréquemment d’une tablette (12 % « jamais, ils ne savent pas s’en servir »), un quart d’un téléviseur connecté (33 % « jamais,… »), 24 % d’un ordinateur (23 % « jamais,… »), 23 % d’une liseuse (23 % « jamais,… ») et 16 % d’un smartphone (31 % « jamais,… »). Environ un quart des parents (27 %) déclarent avoir acheté à plusieurs reprises des applications pour leurs enfants de moins de 12 ans, 61 % ne l’ont jamais fait. La grande majorité des parents ont acheté des applications pour jouer (84 % d’entre eux) mais aussi pour apprendre à lire ou à écrire et s’instruire (46 %).

Les Franciliens et les cadres (respectivement 42 % et 51 % au lieu de 27 % en moyenne) sont les plus nombreux à avoir déjà acheté, à plusieurs reprises, des applications pour leurs jeunes enfants. Les applications éducatives sont particulièrement appréciées par les cadres (66 %), qui sont aussi plus souvent équipés, les parents d’enfants en maternelle (53 %) ou détenteurs d’un diplôme supérieur au bac (52 %).

Pour 56 % des parents interrogés, l’usage des outils numériques par les jeunes enfants est « plutôt une bonne chose », voire « une très bonne chose » pour 20 % d’entre eux, tandis que 19 % pensent le contraire. De même, un parent sur deux (59 % d’ouvriers et 57 % d’hommes) considère qu’il s’agit pour plus tard « d’un atout, car cela leur donne accès à des informations et savoirs que n’avaient pas les autres générations », tandis que seulement 12 % y voient au contraire « un désavantage, car cela habitue à avoir accès à tout facilement sans efforts ». En revanche, pour 35 % des parents (45 % de diplômés de l’enseignement supérieur, 43 % de CSP+ et 41 % de femmes), ce n’est « ni un atout, ni un désavantage, ce n’est qu’une façon pour eux de s’adapter à leur époque ». Dans leur ensemble, les parents interrogés sont partagés sur la question de l’usage des nouvelles technologies numériques à l’école. Un peu plus de la moitié d’entre eux trouve « tout à fait souhaitable » (19 %) et « plutôt souhaitable » (34 %) de développer l’apprentissage sur tablette numérique, en remplacement des manuels scolaires, mais plus de 40 % y sont opposés.

L’agence conseil en communication, treize articles weblab, a recensé pour l’Observatoire Orange-Terrafemina, la diversité des applications destinées aux parents et aux enfants. Sur tablette ou smartphone, les parents disposent de multiples outils les aidant au quotidien, à surveiller à distance, grâce à une caméra, le sommeil de l’enfant, à recevoir des alertes, à lancer une berceuse ou allumer une veilleuse, à l’écouter et à comprendre ses pleurs, et à tenir son carnet de santé. Ces applications permettent aussi aux parents de suivre leurs enfants sur le trajet de l’école grâce au GPS et même de gérer emploi du temps et dépenses en cas de garde partagée. Le marché est vaste, la création de besoins sans limites. Pour les enfants, les logiciels d’apprentissage offrent des copies numériques de l’ensemble des jeux traditionnels, allant de l’avatar numérique de leur peluche, aux cubes, aux puzzles, aux histoires racontées avec la voix de leurs parents, aux jeux éducatifs pour apprendre à dessiner, lire, compter, jouer du piano, s’initier à une langue étrangère, découvrir en jouant les chefs-d’œuvre du musée du Louvre, sans oublier les cahiers de vacances d’un nouvel âge. La tablette peut aussi servir de plateau de jeux interactifs ou encore permettre de jouer en réalité augmentée (voir REM n°10-11, p.39). Pourtant, les enfants ne seraient pas forcément attirés par ces objets high-tech, si leurs parents ne leur donnaient pas l’exemple. « L’enfant a envie de jouer aux mêmes jeux que les adultes. Il calque leurs gestes et attitudes » explique Serge Tisseron. Pour ce psychiatre et psychanalyste qui déconseille la télévision avant l’âge de trois ans (voir REM n°18-19, p.30), « la tablette doit rester un jouet », et son usage doit être accompagné par les parents. Il rappelle que l’efficacité des logiciels éducatifs pour enfants n’a encore jamais été étudiée. Au sujet du remplacement des livres scolaires par une tablette, Serge Tisseron répond que seul le livre apprend à l’enfant la construction narrative et qu’il demeure un objet permettant d’acquérir les repères temporels dont l’enfant a besoin pour assimiler les choses. Au cours de l’année scolaire 2011-2012, les enseignants de l’école primaire ont pu néanmoins tester la solution Bic Education, associant une ardoise numérique, munie d’un stylet, un serveur, un ordinateur portable et un logiciel pédagogique. Conçu par le fabricant du stylo à bille, en partenariat avec Intel, l’ensemble sera commercialisé début 2013.

La navigation sur écran tactile est un jeu d’enfant : dès l’âge de trois ans, ils en font la démonstration. Pour Noël 2012, arriveront des tablettes tactiles conçues spécialement pour eux. Aux Etats-Unis, les applications iPhone ou iPad proposées par les chaînes de télévision diffusant des programmes pour enfants sont déjà parmi celles qui rencontrent le plus de succès.

Sources :

  • « La majorité des enfants rompue aux smartphones et tablettes », AFP, tv5.org, 26 septembre 2012.
  • « Tablette tactile : la nouvelle nounou ? », sondage de l’institut CSA, Observatoire Orange–Terrafemina, 15 p., terrafemina.com, 26 septembre 2012.
  • « Tablette tactile : la nouvelle nounou ? », CSA -Treize Articles Weblab pour l’Observatoire Orange–Terrafemina, 47 p., treizearticles- weblab.com, 26 septembre 2012.
  • « Génération tablette : « Les enfants réclament le même jouet que leurs parents  » », Marine Deffrennes, terrafemina.com, 26 septembre 2012.
  • « Bic et Intel lancent ensemble une tablette pour les écoles », Benoît Georges, Les Echos, 4 octobre 2012.
Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

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