Scissions en vue pour deux géants : News Corp. et Vivendi

Les difficultés rencontrées par SFR, le principal actif du groupe Vivendi, lequel souffre par ailleurs d’une décote de holding, ont conduit le conseil d’administration du géant français des communications à envisager une scission ou des reventes d’actifs afin de répondre aux demandes des actionnaires. Mais le processus est complexe, car c’est en même temps la logique industrielle de Vivendi, mise en place depuis 2002, qui est remise en question en même temps que son management. Outre-Atlantique, le groupe News Corp. a de son côté annoncé sa scission pour répondre officiellement aux demandes de ses actionnaires, mais l’opération a pour objectif d’éviter que le scandale des écoutes au Royaume-Uni ne vienne menacer les très rentables activités audiovisuelles du groupe.

Le cours de Bourse de Vivendi menace le premier groupe de communication français

En annonçant, le 1er mars 2012, une baisse du dividende de 1,4 à 1 euro par action, le groupe Vivendi a pris de court ses actionnaires. Justifiée par des résultats de SFR en baisse en 2012, depuis l’arrivée de Free Mobile sur le marché, lequel a déjà conquis 3,6 millions d’abonnés mobiles à la fin du 2e trimestre 2012, la baisse du dividende a en effet remis au premier rang des préoccupations stratégiques du groupe la décote de holding qui le pénalise.

Les difficultés de SFR, actif principal du groupe, relancent le débat sur la décote de holding dont souffre Vivendi

Vivendi, qui a frôlé la faillite en 2002 au moment de l’éviction de son ancien dirigeant, Jean-Marie Messier, n’est pas parvenu, depuis, à faire remonter son cours de Bourse. Repris en main de 2002 à 2005 par Jean-René Fourtou, devenu ensuite président du conseil de surveillance du groupe, quand Jean-Bernard Lévy, jusqu’alors directeur général, devenait président du directoire, Vivendi a pourtant, grâce à ces deux hommes, retrouvé en dix ans le contrôle de sa dette et mis en place une stratégie efficace de consolidation industrielle et d’expansion internationale. Ainsi, le groupe, de loin le premier groupe de communication français et l’un des grands acteurs mondiaux dans le domaine des médias, dispose mi-2012 de six actifs, trois dans les télécommunications, trois dans les médias, chacun très performant.

Dans les médias, Vivendi est le numéro 1 mondial de la musique avec Universal Music Group, qui se renforce encore avec le rachat d’EMI (voir supra). Le groupe est également le numéro 1 mondial du jeu vidéo avec Activision Blizzard, détenu à 61 % (voir REM n°8, p.40), enfin Vivendi est un acteur majeur de la télévision payante et de la production et distribution de films en Europe avec le groupe Canal+ (voir REM n°21, p.79, et infra). Dans les télécommunications, Vivendi contrôle depuis 2011 l’intégralité du capital de SFR, deuxième opérateur en France après Orange, après avoir racheté à Vodafone, pour 7,75 milliards d’euros, les 44 % que le groupe britannique détenait dans le capital de SFR. Vivendi contrôle également 53 % de Maroc Télécom et, depuis 2009, s’est emparé de l’opérateur brésilien GVT, véritable relais de croissance pour le groupe avec une augmentation du chiffre d’affaires de 35 % attendue en 2012. Or, la contribution de ces différentes activités au chiffre d’affaires et aux résultats est déséquilibrée : SFR représente à lui seul 42 % du chiffre d’affaires du groupe en 2011, suivi de Canal+ (17 %), d’Universal Music Group (15 %) et d’Activision Blizzard (12 %). Autant dire que les difficultés rencontrées par le deuxième opérateur français ont immédiatement inquiété les actionnaires.

S’ajoutent à ces difficultés, qui concernent d’abord le dividende versé aux actionnaires, la question de la décote de holding, les actifs du groupe en Bourse étant sous-évalués de 32 % selon Natixis parce que regroupés dans une maison mère, Vivendi, qui n’est pas parvenue à donner de l’ensemble une vision autre que celle du conglomérat. Ainsi, le cours de l’action Vivendi oscille entre 12 et 14 euros, après avoir atteint jusqu’à 140 euros en 2000, en pleine bulle boursière. Et c’est cette décote qui a resurgi comme une différence majeure du groupe à l’annonce de la baisse du dividende.

Pour y répondre à court terme, Frank Esser, le PDG de SFR, a été remercié dès le 26 mars 2012. Le lendemain, Jean-René Fourtou et Jean-Bernard Lévy optaient pour un changement radical dans la communication du groupe. Alors que Jean-Bernard Lévy avait jusqu’alors mis en avant la consolidation industrielle du groupe (le contrôle de chacun de ses actifs), ainsi que les synergies possibles entre activités médias et télécoms, dans une sorte de convergence où chaque activité conservait toutefois son indépendance, Vivendi fédérant d’abord des filiales ; c’est désormais le cours de Bourse, donc les aspects financiers, qui sont au cœur de la stratégie. Le 27 mars, Jean-René Fourtou et Jean-Bernard Lévy ont envoyé un courrier aux actionnaires annonçant une réaction rapide pour redresser le cours en Bourse de Vivendi : « L’une des raisons de la faiblesse du cours de Bourse, c’est la décote de holding, la différence entre la valeur de Vivendi et la somme de celle de ses activités, qui paraît excessive. Faut-il garder le périmètre du groupe tel qu’il est ? Faut-il vendre des activités ou séparer le groupe en deux, voire trois ? Cette question n’est pas taboue. » Les déboires de SFR, qui reste toutefois bénéficiaire et dispose d’une confortable marge, auront donc eu raison de l’intégrité du groupe, malgré une année 2011 exceptionnelle, avec un chiffre d’affaires de Vivendi de 28,8 milliards d’euros en 2011 et un résultat record de 2,9 milliards d’euros.

A défaut d’une scission rapide, renouveler le management

En précipitant le départ de Frank Esser, remplacé en intérim par Jean-Bernard Lévy, Vivendi a d’abord voulu montrer l’importance accordée au redresse- ment de sa filiale la plus importante en termes de chiffre d’affaires. En même temps, parce que le marché des télécommunications est mature en France et que la concurrence s’est accrue avec l’arrivée de Free Mobile en janvier 2012, le redressement de SFR devrait avoir pour conséquence de limiter la décote de holding, les activités de télé- communications du groupe pénalisant les activités médias où Vivendi dispose d’un positionnement parfait, avec des leaders incontestés, Canal+ pour la télévision payante en France, Universal Music Group et Activision Blizzard comme numéros 1 mondiaux, loin devant leurs concurrents chacun dans son secteur.

Pourtant, cela n’aura pas suffi. A l’occasion du séminaire annuel du groupe qui, de Corse a été rapatrié à Paris du 22 au 24 juin 2012, c’est d’abord un différend stratégique qui a été officialisé entre Jean-René Fourtou et Jean-Bernard Lévy. Le 28 juin 2012, Vivendi annonçait ainsi le départ de Jean-Bernard Lévy du groupe pour « divergence sur l’évolution stratégique de Vivendi ». Certes, les synergies espérées par Jean-Bernard Lévy entre les différentes filiales n’ont pas été concluantes pour le groupe, alors même que la convergence des pratiques est devenue une réalité, les utilisateurs consommant des médias de plus en plus souvent grâce à des terminaux connectés. Mais de telles synergies industrielles restaient de toute façon difficiles à mettre en place, pour plusieurs raisons : chaque filiale a un patron relativement indépendant et responsable de ses résultats, ce qui ne facilite pas systématiquement les accords au sein du groupe ; d’autre part, Vivendi a frôlé la faillite quand il était dirigé par Jean-Marie Messier justement parce que le groupe avait souhaité mettre en place une straté- gie de convergence entre télécommunications et médias, qui s’est révélée être un échec et a fait de Vivendi un conglomérat industriel plutôt qu’un groupe intégré. La stratégie fut donc la bonne, après 2002, qui a donné à chaque filiale des objectifs de performance sur son cœur de métier, ce qui a permis de sortir Vivendi de la spéculation boursière, tout en affichant de bons résultats économiques.

Et c’est probablement pour cette raison que la scission à tout prix n’a pas entraîné l’adhésion sans condition de Jean-Bernard Lévy qui a toujours défendu sa logique de renforcement industriel. Ainsi, le rachat à prix élevé des 44 % de Vodafone au capital de SFR, juste avant l’arrivée de Free Mobile sur le marché, a pu être dénoncé par les actionnaires. Or ce rachat, en permettant à Vivendi de contrôler 100 % de SFR, met fin au pacte d’actionnaires signé avec Vodafone qui limitait les possibilités pour SFR de concurrencer son partenaire sur d’autres marchés. L’opération devait donc permettre à SFR de jouer la carte de l’international et, à terme, de rapprocher les activités de télécommunications du groupe. Cette stratégie aurait permis de relancer l’ensemble télécommunications car, si SFR et Maroc Télécom opèrent sur un marché mature, GVT bénéficie du dynamisme et de la croissance du marché brésilien.

Par ailleurs, la scission du groupe est en fait très difficile, d’abord parce que la dette est logée dans la maison mère, Vivendi, et non dans ses filiales, ensuite parce qu’il n’y a pas de blocs cohérents. Ainsi, le pôle médias réunit des activités sans lien entre elles ; le pôle télécommunications pourrait être intégré, mais à plus long terme ; enfin les synergies sont possibles, mais plutôt entre leaders nationaux, par exemple Canal+ et SFR, or les autorités de la concurrence auront toujours tendance à les interdire.

Après la démission de Jean-Bernard Lévy, le groupe a donc opté pour une phase de réflexion stratégique en nommant par intérim, dès le 29 juin 2012, Jean- François Dubos à la présidence du directoire de Vivendi et Stéphane Roussel à la tête de SFR. Michel Combes, annoncé à la tête de SFR et proposé par Jean-Bernard Lévy, a de son côté aussitôt déclaré rester chez Vodafone. Le 20 août 2012, la nouvelle direction du groupe était présentée, avec le maintien de Jean-François Dubos, épaulé par Bertrand Méheut pour la réflexion sur le développement des médias et des contenus. Bertrand Méheut conserve par ailleurs la présidence du directoire du groupe Canal+. Jean-Yves Charlier, qui siégeait au conseil de surveillance de Vivendi, prend la direction générale des activités de télécommunications, Stéphane Roussel restant PDG de SFR.

Que Bertrand Méheut et Jean-Yves Charlier soient, l’un et l’autre, chargés d’une réflexion sur l’avenir des médias et des télécommunications dans le groupe ne signifie pas pour autant qu’une scission des activités est à prévoir. Parce qu’elle est difficile et n’a pas nécessairement de cohérence industrielle, la scission du groupe n’aura pas lieu. Ainsi, et malgré la teneur de la lettre du 27 mars, Vivendi a confirmé, le 30 août 2012, ne pas pouvoir opter pour une scission du groupe, notamment à cause du poids de la dette (14,1 milliards d’euros). Mais il faudra satisfaire la Bourse. Une des solutions sera donc probablement de faire de Vivendi un groupe plus petit mais plus riche, la vente de certaines activités permettant au groupe de racheter ensuite ses actions et de faire remonter son cours en Bourse.

La France risque-t-elle de perdre son seul acteur de dimension internationale dans les activités de communication ?

Si elles sont examinées, les cessions des activités du groupe seront, elles aussi, difficiles, pour plusieurs raisons. La première d’entre elles est liée au positionnement et à la taille des différentes filiales. A l’exception de GVT, les activités de Vivendi sont majoritairement réalisées par des leaders sur des marchés matures. Autant dire que les repreneurs potentiels seront rares.

Parmi les activités pouvant faire l’objet d’une cession, Activision Blizzard et GVT ont aussitôt été identifiées par les analystes dans la mesure où il s’agit de filiales très indépendantes au sein du groupe. Leur vente est toutefois problématique. La participation de 61 % de Vivendi dans Activision Blizzard, qui est coté en Bourse, s’élève à 8,2 milliards de dollars (6,7 milliards d’euros), l’éditeur dans son ensemble pesant 13,3 milliards de dollars en Bourse. Incontestable numéro 1 mondial du jeu vidéo, Activision Blizzard est plus de trois fois plus important que le deuxième acteur du marché, Electronics Arts, dont la valeur en Bourse est de 3,9 milliards de dollars. Ainsi, la seule participation de Vivendi dans Activision-Blizzard pèse plus du double que la totalité du capital d’Electronics Arts, interdisant de facto un rachat de celle-ci par un acteur du jeu vidéo. Une autre difficulté concernant Activision Blizzard est liée au fait que le groupe évolue sur un marché mature, celui du jeu vidéo des franchises et du jeu massivement multi-joueurs, alors que se développe dans ce secteur le jeu en ligne dit « social » avec des acteurs nouveaux et en forte croissance comme Zynga. La croissance d’Activision Blizzard sera donc limitée à terme et tout éventuel repreneur ne pourra être intéressé que par des synergies à imaginer avec l’activité jeu vidéo de l’éditeur, le nom de Microsoft ayant été avancé, qui dispose de la console Xbox et de la Kinect, ou encore Warner et Disney, des entreprises suffisamment riches pour s’emparer du numéro 1 mondial du jeu vidéo. Enfin, se séparer d’Activision Blizzard revient, pour Vivendi, à se séparer d’une activité très rentable, l’éditeur dégageant une marge de 43 % au premier semestre 2012.

C’est d’ailleurs la marge élevée et la croissance soutenue du chiffre d’affaires de GVT qui rend là encore la cession difficile. Seul actif en forte croissance du groupe, GVT, racheté 2,8 milliards d’euros en 2009, en vaudrait entre 7 et 8 milliards d’euros en 2012 selon Reuters. Se séparer de l’actif qui tire la croissance du groupe, parce que positionné dans les pays du Sud à forte croissance, reviendrait à recentrer les activités de Vivendi sur les seuls marchés matures des Etats-Unis, d’Europe et de l’Asie industrialisée. Le groupe a toutefois recruté les banques Rothschild et Deutsche Bank pour étudier la possibilité d’une cession de GVT.

Enfin, Universal Music Group est également très indépendant du reste du groupe mais sa vente, alors que le numéro 1 mondial de la musique est en train de s’emparer d’EMI et doit convaincre la Commission européenne (voir supra), est là aussi très difficile.

Quant au dernier actif étranger, les 53 % de Vivendi dans le capital de Maroc Télécom, une vente est là encore compliquée, même si elle est plus justifiée. Longtemps porteuse de croissance, cette filiale rencontre, comme SFR en France, ses premières difficultés sur un marché marocain des télécommunications arrivé à maturité. Par ailleurs, Vivendi ne perçoit que des dividendes de Maroc Télécom et n’a pas accès à sa trésorerie. Sauf que Maroc Télécom est la première entreprise du pays, et l’Etat marocain y détient encore une participation de 30 %, rendant toute cession politiquement compliquée.
Restent donc les actifs dont le cœur d’activité est en France, SFR et le groupe Canal+. Vivendi n’ayant plus aucune raison d’être sans SFR, poids lourd du groupe, seul le groupe Canal+ pourrait faire l’objet d’une cession. Cette possibilité, qui permettrait au groupe de médias d’être mieux valorisé et de ne pas avoir à limiter les synergies avec SFR au nom de la concurrence, est peut-être la plus envisageable et elle pourrait être initiée par l’évolution même du capital du groupe Vivendi. En effet, Vincent Bolloré va devenir le premier actionnaire de Vivendi à l’occasion de la cession de ses chaînes Direct 8 et Direct Star (voir infra et voir REM n°21, p.79).

Vincent Bolloré, qui a racheté sur le marché près de 3 % des actions du groupe Vivendi, devrait, avec la cession de ses chaînes, en contrôler près de 5 %. Et Vincent Bolloré a cédé à Dentsu, le géant japonais de la publicité, sa participation dans le groupe publicitaire britannique Aegis, le 12 juillet 2012, récupérant ainsi 915 millions d’euros qu’il peut en partie réinvestir dans Vivendi pour contrôler jusqu’à 10 % du capital du groupe. Intéressé d’abord par les activités médias, Vincent Bolloré, que Jean-René Fourtou a invité à entrer à l’avenir dans le conseil de surveillance du groupe, pourrait donc à terme monnayer sa participation dans Vivendi contre une participation dans le seul groupe Canal+. Ce dernier valant entre 4 et 5 milliards d’euros, Vincent Bolloré pourrait donc contrôler près de 40 % du groupe Canal+, équivalant à une participation de 10 % dans Vivendi. Dans ce cas, la cession du groupe Canal+ pourrait passer par une introduction en Bourse, même si le contexte est peu favorable. En effet, Canal+ a entamé un tournant stratégique vers la télévision gratuite et la télévision connectée et doit faire face, sur le marché de la télévision payante, à de nouvelles obligations imposées par l’Autorité de la concurrence à la suite du réexamen de la fusion TPS-CanalSat (voir infra), tout en ayant à affronter la concurrence nouvelle de BeInSport (voir supra). Cette solution aurait au moins pour résultat de préserver le périmètre mondial du groupe Vivendi tout en cédant une activité dont le cœur de métier est en France, évitant ainsi que la seule logique boursière affaiblisse trop les véritables perspectives industrielles du premier groupe français de communication. Elle permettrait également au groupe Lagardère, qui détient 20 % de Canal+ France, d’introduire enfin sa participation en Bourse, après que celle-ci a été transformée en actions Canal+ groupe.

La Bourse et les scandales conduisent News Corp. à une scission contrôlée

Ebranlé par l’affaire des écoutes téléphoniques qui a conduit à la fermeture, en juillet 2011, du tabloïd britannique News of the World (voir REM n°20, p.30), le groupe News Corp. s’est résolu à suivre la partie de ses actionnaires indépendante de la famille de Rupert Murdoch et qui demande, depuis plusieurs années déjà, la scission du groupe avec, d’un côté, les très rentables médias audiovisuels et le cinéma, et de l’autre les activités de presse. C’est donc un autre géant mondial des médias qui va se scinder pour éviter la décote de ses activités médias, logées dans un groupe où la presse compte encore pour 20 % du chiffre d’affaires, mais 10 % de son résultat d’exploitation, sur un marché difficile partout dans le monde.

Le contrôle par News Corp. à la fois des activités de presse, à l’origine du groupe, et des activités médias, aura toutefois été maintenu le plus longtemps possible par son fondateur, Rupert Murdoch. Mais le scandale des écoutes aura eu raison de l’alliance entre la presse et l’audiovisuel en conduisant à l’abandon du rachat de la totalité du capital de BSkyB, le 12 juillet 2011, et en menaçant même le contrôle de News Corp. sur les 39 % de capital qu’il détient dans le bouquet de télévision payante britannique, l’actionnaire majoritaire du groupe devant être considéré comme « convenable » par l’Ofcom, qui enquête sur BSkyB. En effet les déboires de News International, la filiale britannique de presse de News Corp., en menaçant BSkyB, jouent désormais contre la croissance du groupe et ses performances, BSkyB étant un actif très rentable quand le Times affiche des pertes.

Ainsi, le 28 juin 2012, à l’issue du conseil d’administration du groupe, fut officialisée la scission du groupe en deux entités. La première, la plus importante, regroupera les activités dans l’audiovisuel et le cinéma, à savoir Twentieth Century Fox pour le cinéma, Fox News et Fox Broadcasting Studio pour la télévision aux Etats-Unis, mais également les bouquets européens de télévision payante, BSkyB, Sky Italia et Sky Deutschland. Cet ensemble repré- sentait, avant la scission, les deux tiers du chiffre d’affaires du groupe, soit 24,5 milliards de dollars pour l’exercice 2011, et 90 % de ses profits opérationnels. La seconde regroupe les activités presse, ainsi que l’édition avec Harper Collins, soit 8,8 milliards d’euros pour l’exercice 2011. La scission devrait être effective au printemps 2013, sans pour autant se traduire par une perte de contrôle de Rupert Murdoch, qui restera président des deux sociétés, cotées en Bourse. Les actionnaires recevront donc pour chaque action News Corp. une action des deux sociétés après la scission. Cette dernière devrait sans aucun doute contribuer à une meilleure valorisation des activités audiovisuelles et de cinéma, ainsi des chaînes américaines (Fox Broadcasting et MyNetworkTV), les actifs les plus performants du groupe qui, pour 24 % du chiffre d’affaires de News Corp., sont à l’origine de 61 % de ses bénéfices. C’est d’ailleurs au nom d’une meilleure valorisation pour les actionnaires que la scission a été présentée, même si elle permet surtout de dissocier BSkyB des activités presse de News Corp. au Royaume-Uni, laissant ouverte la possibilité d’une nouvelle tentative pour contrôler la totalité du capital du bouquet de télévision payante.

Mais la scission pourrait aller bien au-delà de la simple séparation des activités, telle qu’elle a été présentée à l’issue du conseil d’administration de News Corp. En effet, mi-juillet 2012, Rupert Murdoch a démissionné de la plupart de ses fonctions dans la presse britannique, abandonnant notamment le conseil d’administration de News International, qui édite le Times et le Sun. Présentées par Rupert Murdoch comme « un ménage interne en amont de la scission du groupe », ces démissions pourraient laisser présager une vente des actifs britanniques afin d’isoler les autres titres du groupe des enquêtes en série sur les pratiques des journalistes du groupe News Corp. au Royaume-Uni (voir REM n°22-23, p.38). Ce sont en effet des titres comme le Wall Street Journal ou encore l’agence Dow Jones qui peuvent être entraînés dans les déboires des activités britanniques.

Sources :

  • « Vivendi prêt à accueillir Bolloré au sein de son conseil de surveillance », Grégoire Poussielgue et Fabienne Schmitt, Les Echos, 20 avril 2012.
  • « Vivendi en quête d’une nouvelle stratégie », Marie-Cécile Renault, Le Figaro, 22 juin 2012.
  • « Remue-méninges autour de l’avenir de Vivendi », Cécile Ducourtieux et Cédric Pietralunga, Le Monde, 23 juin 2012.
  • « Vivendi se prépare à entrer dans une nouvelle ère », Grégoire Poussielgue et Fabienne Schmitt, Les Echos, 26 juin 2012.
  • « News Corp. prêt à se scinder en deux », Virginie Robert, Les Echos, 27 juin 2012.
  • « Divorce à la tête de Vivendi : Jean-Bernard Lévy quitte le groupe », Delphine Cuny, latribune.fr, 28 juin 2012.
  • « News Corp. scindé, Murdoch restera à la tête des deux entités », Virginie Robert, Les Echos, 29 juin 2012.
  • « Démanteler Vivendi, pour quoi faire ? », Sandrine Cassini et Delphine Cuny, latribune.fr, 29 juin 2012.
  • « Vivendi change de PDG et cherche une stratégie », Marie-Cécile Renault, Le Figaro, 29 juin 2012.
  • « La taille d’Activision Blizzard complique son éventuelle vente par Vivendi », Romain Gueugneau, Les Echos, 3 juillet 2012.
  • « Vivendi, le retour des « papis flingueurs » », Solveig Godeluck, Grégoire Poussielgue et Guillaume de Callignon, Les Echos, 6 juillet 2012.
  • « La cession d’Aegis donne des munitions à Bolloré pour monter dans Vivendi », A.F. et G. de C., Les Echos, 13 juillet 2012.
  • « Vivendi va accélérer les cessions », Enguérand Renault et Marie-Cécile Renault, Le Figaro, 14 juillet 2012.
  • « News Corp. engage sa restructuration avec la démission de Rupert Murdoch », latribune.fr, 22 juillet 2012.
  • « Rupert Murdoch lâche ses journaux britanniques », Marie-Catherine Beuth, Le Figaro, 23 juillet 2012.
  • « Rupert Murdoch quitte la tête de ses journaux britanniques », R.G., Les Echos, 23 juillet 2012.
  • « Malgré des résultats décevants, News Corp. tente de reprendre la main », Nicolas Rauline, Les Echos, 10 août 2011.
  • « Vivendi prépare la cession de sa pépite brésilienne GVT », Grégoire Poussielgue, Les Echos, 20 août 2012.
  • « Vivendi se dote d’un commando pour redéfinir sa stratégie », Enguérand Renault, Le Figaro, 21 août 2012.
  • « Vivendi : pas de scission médias/télécom à cause de la dette », Delphine Cuny, latribune.fr, 30 août 2012.
  • « Lagardère veut encore relancer l’introduction en Bourse de Canal+ », A.F. et F. SC., Les Echos, 30 août 2012.
  • « La dette de Vivendi l’oblige à temporiser avant d’arrêter sa nouvelle stratégie », Grégoire Poussielgue, Les Echos, 31 août 2012.
  • « Vivendi renonce à scinder le groupe entre télécoms et médias », Marie-Cécile Renault, Le Figaro, 31 août 2012.
  • « Free Mobile a conquis 3,6 millions de clients », Maire-Cécile Renault, Le Figaro, 1er septembre 2012.
Professeur à Aix-Marseille Université, Institut méditerranéen des sciences de l’information et de la communication (IMSIC, Aix-Marseille Univ., Université de Toulon), École de journalisme et de communication d’Aix-Marseille (EJCAM)

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