Succédant à la 4G tout juste lancée, la prochaine norme de téléphonie mobile devrait multiplier par 100 la capacité des réseaux. Dans cette course à l’innovation, le chinois Huawei s’allie aux Européens. Rendez-vous en 2020.
Au salon des technologies numériques Cebit, à Hanovre en mars 2014, le Premier ministre britannique David Cameron et la chancelière allemande Angela Merkel ont annoncé la collaboration du Royaume-Uni et de l’Allemagne pour le développement de la future génération de réseau internet mobile. Ainsi les chercheurs de l’université allemande de Dresde, du King’s College de Londres et de l’université de Surrey, au sud de Londres, vont travailler ensemble pour relever le défi industriel que représentent les réseaux mobiles de 5e génération.
L’arrivée de la 5G a mobilisé dès 2012 les principaux opérateurs et industriels du secteur réunis dans le cadre d’un projet de recherche et développement baptisé METIS (Mobile and wireless communications systems Enablers for the Twenty-twenty Information Society). Financé en partie par l’Union européenne, il compte vingt-neuf membres, parmi lesquels Orange, Deutsche Telekom, Telefonica, Alcatel-Lucent, Ericsson, Nokia Siemens Network et le fabricant d’automobile BMW, ainsi que des acteurs extérieurs à l’Europe, comme l’opérateur mobile japonais Docomo et l’équipementier chinois Huawei. Projet précurseur sur la standardisation, METIS a bénéficié de la part de la Commission européenne d’une aide de 16 millions d’euros sur un total de 50 millions versés pour l’année 2014 en direction de divers projets de recherche concernant la 5G. La participation inédite d’acteurs non européens au sein de METIS s’explique par la volonté de fédérer tous les acteurs autour d’un seul standard pour la 5G. Trop de technologies concurrentes avaient constitué un frein au développement des standards précédents, 1G, 2G et même 3G.
En décembre 2013, la Commission européenne a annoncé la mise en place d’un partenariat public-privé, le 5G PPP, afin d’abonder l’ensemble des projets 5G en recherche et développement.
Regroupant notamment Alcatel-Lucent, Ericsson, Nokia Solutions and Networks, Orange et SES, et présidé par l’équipementier finlandais NSN, le 5G PPP est doté d’un budget de 1,4 milliard d’euros d’ici à 2020, dont 700 millions apportés par la Commission européenne. En annonçant investir 440 millions d’euros dans la recherche et le développement pour la 5G d’ici 2018, le groupe chinois Huawei s’engage aux côtés des Européens, en doublant les effectifs de ses équipes de R&D installées dans l’Union européenne, avec notamment trois nouveaux sites ouverts en France. Numéro 1 mondial des équipements de réseau,Huawei cofinance, avec Samsung et Telefonica, la création d’un centre d’innovation sur la 5G au sein de l’université britannique de Surrey.
L’objectif des acteurs du secteur est de rendre la 5G disponible partout en Europe. Grâce à une première enveloppe de 125 millions d’euros, le 5G PPP a commencé cette année ses travaux sur les usages du futur. L’une des principales difficultés techniques du déploiement de la 5G est de parvenir à une homogénéité de la connectivité. Afin que la couverture en 5G soit partout la même, les chercheurs se penchent notamment sur l’interaction des antennes entre elles.
Après la voix sur les réseaux mobiles 1G et 2G, le haut débit avec la 3G et le très haut débit avec la 4G, la promesse de la 5G est une connectivité totale, c’est-à-dire permanente et omniprésente. Prévue pour être opérationnelle en 2020, la nouvelle technique 5G devra correspondre aux exigences de la vie future, organisée notamment autour de maisons intelligentes, de villes entièrement connectées, de secteurs d’activité transformés par la numérisation, comme le seront à terme les transports, la santé et l’éducation. Plus de 50 milliards d’objets seront connectés à l’internet mobile en 2020. La 5G offrira un débit de 1 gigabit par seconde, soit 10 fois plus que la 4G, pouvant aller jusqu’à 10 gigabits par seconde avec un temps de latence réduit à 1 milliseconde. Les secondes qui s’écoulent entre la commande d’un appareil et son exécution sont encore trop longues aujourd’hui pour assurer le contrôle des voitures connectées ou le pilotage des drones. Le premier défi de la 5G sera donc d’assurer l’efficacité et la fiabilité des connexions, avec la multiplication des services en temps réel. L’autre défi majeur sera de permettre un fonctionnement moins énergivore afin d’augmenter la durée d’utilisation des appareils connectés.
Selon les industriels, le développement d’une nouvelle technologie mobile demande au moins dix ans. Il en faut bien davantage pour la mettre à la disposition de la population. En 2003, plus de 3 000 communes en France étaient recensées en « zone blanche ». Dix ans plus tard, en avril 2014, 105 d’entre elles n’étaient toujours pas couvertes par un réseau de téléphonie mobile. Quant à la toute nouvelle 4G, les objectifs de couverture sont de 25 % de la France métropolitaine en 2015, 60 % en 2019, 75 % en 2023 et 99,6 % en 2027.
Au Cebit 2014, la chancelière allemande, qui fut l’une des cibles des écoutes téléphoniques de la NSA, a rappelé la nécessité pour l’Europe d’instaurerune réglementation commune sur la protection des données personnelles, non sans avoir « discuté intensivement de ces questions avec nos partenaires américains ».
Sources :
- « 5G : la Corée du Sud accélère, et met le paquet », ZDNet.fr, 22 janvier 2014.
- « Huawei veut mener la bataille de la 5G en Europe », Romain Gueugneau, Les Echos, 12 février 2014.
- « La 5G devrait vous faire rêver », Sarah Belouezzane, Le Monde, 26 février 2014.
- « Les industriels chinois se sont lancés tôt dans la bataille », Harold Thibault, Le Monde, 26 février 2014.
- « Mobile : Royaume-Uni et Allemagne vont collaborer sur la 5G », AFP, tv5.org, 9 mars 2014.
- « France : les réseaux de téléphonie mobile manquent encore à 105 communes », AFP, tv5.org, 27 mai 2014.