Pheme, le fact-checking pour réseaux sociaux

L’Union européenne finance la création d’un outil de détection des rumeurs circulant sur le web social :Pheme.

Du nom de la déesse grecque de la renommée, le programme de recherche Pheme rassemble cinq universités européennes (University of Sheffield, Universitaet des Saarlandes, MODUL University Vienna, Kings College London, University of Warwick) et quatre entreprises privées (Ontotext AD, ATOS Spain SA, iHub Ltd, SwissInfo.ch). Combinant le big data avec des technologies de pointe de visualisation et de traitement du langage, il a pour objet de modéliser, d’identifier et de vérifier les fausses nouvelles qui se répandent sur les réseaux sociaux. L’idée d’un tel outil de vérification des faits en temps réel est née après les émeutes qui ont eu lieu à Londres en 2011, à la suite desquelles s’étaient répandues sur les réseaux sociaux toutes sortes de fausses nouvelles.

Conduit par Kalina Bontcheva, chercheur au département d’informatique de l’université de Sheffield, en Grande-Bretagne, ce programme de fact-checking vise à inventer un algorithme capable de reconnaître, automatiquement et en temps réel, quatre catégories d’informations peu crédibles que sont la spéculation, la controverse, la fausse information et la désinformation.

Appartenant à des champs disciplinaires divers (traitement automatique du langage naturel, exploration des documents, web science, analyse des réseaux sociaux, visualisation d’information…), les partenaires du programme Pheme s’appuieront sur trois éléments pour détecter la véracité des informations : l’information elle-même, le recoupement avec des bases de données jugées particulièrement fiables et l’analyse de la diffusion de l’information (qui reçoit quelle information et comment, quand est-elle transmise et à qui ?). Les résultats de cet « algorithme de la rumeur » seront visualisés sur un tableau de bord interactif, affichant notamment des modèles de diffusion virale, les genres de message (neutre, affirmatif, négatif ou interrogatif), les trajectoires de la diffusion par auteur et par sphère d’influence.

Selon ses auteurs, le programme Pheme trouvera des applications immédiates dans les systèmes d’information médicale et dans le journalisme sur internet. La version beta de cet outil devrait être lancée sur le site d’information SwissInfo.ch, de la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SRG SSR), avant la fin 2015.

Prévu pendant trois ans, son aboutissement étant fixé à décembre 2016, et financé à hauteur de 2,9 millions d’euros par l’Union européenne, ce programme permettra de visualiser la dynamique de la rumeur et expliquera ainsi par qui, pourquoi et comment elle se répand. Outre les applications commerciales (gestion de la réputation des marques ou de la relation client par exemple), les créateurs de Pheme y voient également un outil au service de la société tout entière grâce auquel les journalistes, les gouvernements, les services d’urgence, les agences de santé, tout comme les entreprises, pourront suivre la propagation des fausses nouvelles en ligne, afin de réagir à leurs effets pervers. « Dans le procédé de vérification, tout ne peut pas être exécuté par une machine, une grande partie du travail doit encore être fournie par l’homme », se plait à tempérer Kalina Bontcheva.

Sources :

  • « Computing Veracity across Media, Languages, and Social Networks », Pheme, pheme.eu.
  • « Social “lie detector” will help journalists verify online rumours », Abigail Edge, journalism.co.uk, 27 February 2014.
  • « Pheme : le projet de fact-checking à l’échelle européenne », Gaelle Legrand, Horizons Médiatiques – édition Europe, horizonsmediatiques.fr, 21 mars 2014.
Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

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