Pour un web écoresponsable

Une étude inédite montre combien les sites web peuvent être énergivores.

L’impact énergétique des technologies internet est désormais bien connu (voir REM n°28, p.18), mais il risque de suivre une courbe exponentielle. « La consommation énergétique des infrastructures du web (serveurs, data centers…) pourrait représenter, en 2030, l’équivalent de la consommation énergétique mondiale de 2008 » annonce l’Ademe. Dans le cadre de sa mission d’information et de responsabilisation des citoyens, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie a apporté son soutien au projet Web Energy Archive (WEA), visant à mesurer la consommation d’électricité « côté utilisateurs », c’est-à-dire celle de la consultation des sites web, évaluée en fonction des programmes informatiques et des supports numériques utilisés.

Mené au sein du Green Code Lab, spécialisé dans la conception écologique de logiciels, ce projet WEA a consisté à mesurer durant une année la dépense d’énergie émanant de la consultation de 600 sites web français, incluant les 100 totalisant le plus de visites (OJD/Médiamétrie). L’étude montre un écart important entre les sites, allant de 10 à 300 Wh (watt-heure) pour 1 000 pages vues. La consommation annuelle des 100 sites français les plus visités équivaut à la dépense d’énergie de 3 077 foyers, soit 8,3 GWh (gigawatt-heure). En incluant la consommation d’électricité du terminal utilisé, la consommation grimpe à 68 GWh, correspondant à celle de 25 400 foyers. Côté serveur, la consommation engendrée par la consultation de ces 100 sites est 10 fois moins importante, soit 0,58 GWh. Ainsi l’étude montre que les sites les plus visités – parmi lesquels les sites d’information – sont aussi les plus « lourds » en octets (photos, vidéos, bannières publicitaires…) et que par l’effet démultiplicateur du nombre élevé de visiteurs, leur consommation énergétique côté client est 100 fois plus importante que celle côté serveur. Sur une année, le volume de données échangées entre les 100 sites étudiés et les serveurs sollicités est de 171 Po (pétaoctet), ce qui correspond à 5,7 millions de DVD Blu-ray.

L’étude WEA a également établi un classement des navigateurs et des systèmes d’exploitation en fonction de leur consommation d’électricité. Il en ressort que les systèmes d’exploitation Android pour smartphones et tablettes (en moyenne 9,2 Wh d’énergie consommés pour 1000 pages vues) est environ 5 fois moins énergivore que les systèmes d’exploitation pour ordinateur PC. Quant aux navigateurs, Chrome de Google (27 Wh pour 1000 pages vues) est le plus énergivore, devant Internet Explorer de Microsoft et Firefox, qui ont le même niveau de consommation.

Les spécialistes du Green Code Lab entendent ainsi démontrer la nécessité de concevoir des sites web consommant mieux l’énergie. « Les développeurs aujourd’hui ne se soucient pas du tout de l’énergie qui sera consommée et du matériel qu’il faudra pour utiliser leurs produits. Il est urgent de mettre en place de bonnes pratiques » selon Thierry Leboucq, membre du Green Code Lab. Des règles simples, comme limiter l’usage des logiciels d’animation ou optimiser l’utilisation des images, contribuent à économiser environ 25 % d’électricité, tout en accélérant la vitesse de téléchargement du site.

Sources :

  • Green Code Lab, greencodelab.fr
  • « Etude Web Energy Archive : la consommation énergétique des sites web, côté utilisateur », Ademe, presse.ademe.fr, 4 juillet 2014.
  • « La consommation énergétique des sites internet très inégale », La Correspondance de la Presse, 7 juillet 2014.
Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

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