Pour s’adapter à la concurrence, l’européen Airbus va fabriquer des satellites plus légers, à propulsion électrique.
Sur le marché des lanceurs de satellites, la guerre des prix fait rage depuis l’arrivée de l’outsider américain SpaceX. Créée en 2002 par le milliardaire américain Elon Musk – également cofondateur et PDG du constructeur de voitures électriques Tesla Motors – cette société a bouleversé l’économie du marché des lanceurs. Bénéficiant de contrats passés avec le Département de la défense américain et la NASA, SpaceX peut par ailleurs proposer les services de sa fusée Falcon 9 à prix cassés pour des petits satellites d’une charge maximale de 3,5 tonnes. L’opérateur luxembourgeois SES devient son premier client, avec le lancement à moitié prix (55 millions de dollars) d’un satellite de télécommunications, en décembre 2013. Pour rester compétitives, les entreprises européennes se lancent sur le marché de la propulsion tout-électrique. Plus chère, cette technologie, qui permet de réduire de près de moitié le poids des satellites, présente l’avantage de baisser considérablement le coût du lancement. En 2014, le constructeur européen Airbus a reçu deux commandes consécutives.
Des batteries embarquées sont déjà utilisées depuis longtemps pour maintenir le satellite sur sa position orbitale. Désormais, la technologie électrique sert aussi au lancement des appareils, en remplacement de la propulsion chimique. L’américain Boeing est précurseur dans ce domaine. Quatre satellites tout-électriques lui ont été commandés en 2012, ils seront lancés par SpaceX.
En juillet 2014, l’opérateur SES, numéro 2 mondial, a passé commande à Airbus Defense and Space (Airbus Group/ex-EADS) d’un satellite de communication tout-électrique de 5,5 tonnes, une première pour la propulsion d’un engin de ce poids. Son lancement est prévu pour 2017. En septembre 2014, l’opérateur de satellite Eutelsat (numéro 3 mondial), l’opérateur de lancement Arianespace et Airbus Defense and Space ont conclu un contrat pour lancer un satellite à propulsion électrique de 3,5 tonnes au premier semestre 2017. Deux fois plus puissants que ceux de Boeing, les satellites tout-électriques d’Airbus promettent de réduire la durée de mise en orbite géostationnaire à quatre mois, contre huit mois pour son concurrent américain. Il parvient ainsi à limiter le principal défaut de l’électrique par rapport à la propulsion chimique qui effectue cette opération en cinq jours.
En France, la technologie électrique figure parmi les programmes gouvernementaux d’investissements d’avenir définis en 2013. Les constructeurs français Airbus, Thales Alenia Space et Safran sont également soutenus par le Centre national d’études spatiales (CNES). Si la France et l’Allemagne, apportant respectivement 50 % et 25 % du financement, parviennent à se mettre d’accord, le prochain lanceur européen Ariane 6 sera opérationnel en 2020. Il concurrencera alors l’américain SpaceX avec des prix de lancement relativement peu élevés (85 millions d’euros pour les gros satellites et 65 millions pour les plus petits). Porté par l’internet haut débit et les télécommunications mobiles – notamment l’internet des objets –, ainsi que les services de télévision dans les pays émergents, le marché des satellites est en pleine croissance. Un quart des satellites devrait être tout-électrique à l’horizon 2020, selon le cabinet Euroconsult.
Sources :
- « La bataille de l’espace se déplace sur le terrain des satellites », Dominique Gallois, Le Monde, 6 août 2014.
- « Satellites électriques : la contre-offensive des Européens prend forme », AFP, tv5.org, 11 septembre 2014.
- « Espace : Ariane 6 se rapproche du pas de tir », Alain Ruello, Les Echos, 18 septembre 2014.