Publicité : TF1 affaiblit RTL en Belgique et rachète Aufeminin à l’allemand Springer

Décrochages publicitaires en Belgique, développement dans le numérique et régie paneuropéenne témoignent de la volonté du Groupe TF1 de faire de sa régie une alternative aux offres intégrées proposées par les géants de l’internet.

Alors que la publicité à la télévision est tendanciellement en baisse depuis 2000 (voir La rem n°41, p.35), les groupes abritant les anciennes chaînes historiques comme TF1 et M6, multiplient les initiatives pour relancer les dépenses des annonceurs sur leurs chaînes, mais pour proposer également des offres d’espaces couplant désormais les spots télévisés à des inventaires en ligne. Ces deux tendances sont caractéristiques des initiatives actuelles du Groupe TF1 sur le marché publicitaire.

Alors que TF1 milite pour un assouplissement en France des règles concernant les secteurs interdits de publicité à la télévision (voir La rem n°44, p.35), le groupe cherche à augmenter ses recettes publicitaires dans les marchés francophones où la chaîne TF1 réalise des parts d’audience significatives. Ainsi, après s’être alliée avec Ringier en 2011 pour commercialiser des espaces publicitaires sur TF1 en Suisse, la chaîne française a, en septembre 2017, commencé à proposer des décrochages publicitaires en Belgique francophone, où elle capte 15 % de parts d’audience. L’arrivée de TF1 sur le marché publicitaire belge aura d’ailleurs convaincu RTL-TVI, la chaîne belge de RTL Group, qui contrôle près de 70 % du marché publicitaire belge à la télévision, d’engager un plan de licenciements portant sur près de 13 % de ses effectifs.

En France, faute de pouvoir compter sur une croissance forte du marché publicitaire à la télévision, le Groupe TF1 cherche à se développer sur l’internet pour proposer aux annonceurs une offre globale alliant la puissance de ses écrans à la télévision et un ciblage affiné des audiences sur l’internet. Le Groupe TF1 a ainsi investi dans Minute Buzz en 2016 et s’est allié en 2017 avec ProSiebenSat1 et Mediaset au sein de Studio71 (voir La rem n°41, p.37). Il vient de franchir une étape supplémentaire, le 12 décembre 2017, en annonçant le rachat à Axel Springer de sa participation de 78,43 % dans le groupe Aufeminin, l’accord de cession ayant été définitivement conclu le 18 janvier 2018. La transaction valorise Aufeminin 364,8 millions d’euros, quand Axel Springer était entré au capital de l’éditeur français sur une valorisation de 300 millions d’euros en 2007.

Le Groupe TF1 s’empare ainsi d’un ensemble bien présent en France, mais également aux États-Unis, avec 133 millions de visiteurs uniques mensuels. Pour le Groupe TF1, il s’agit d’un véritable changement d’échelle sur l’internet, Aufeminin revendiquant, dans son rapport 2016, 9,9 millions de visiteurs uniques chaque mois en France, sur des thématiques visant principalement la cible féminine très prisée des annonceurs, à savoir la mode, la beauté, la santé ou encore la cuisine. Seul sur le marché français, Aufeminin n’avait pas la taille critique, ce qui explique la décision d’Axel Springer de s’en séparer. À l’inverse, en rejoignant le Groupe TF1, Aufemin va pouvoir s’adosser à la première régie publicitaire française de télévision et intégrer ses écrans dans une offre globale.

Aux États-Unis, le Groupe TF1 récupère des actifs stratégiques, tel Livingly Media, qui compte parmi les vingt premiers éditeurs de sites dans la thématique LifeStyle. De ce point de vue, l’internationalisation progressive du Groupe TF1, par les décrochages publicitaires de sa chaîne et surtout grâce à l’internet, doit lui permettre de proposer aux annonceurs une offre susceptible de s’imposer comme une alternative possible aux plateformes comme Facebook ou Google. Cette volonté s’était déjà traduite en juin 2017 par le lancement de la régie paneuropéenne EBX (European Broadcaster Exchange), en partenariat avec Mediaset et ProSiebenSat1, qui permet aux groupes audiovisuels européens de commercialiser des écrans publicitaires en ligne sur les principaux marchés européens.

Sources :

  • « En difficulté, RTL Belgique licencie », Thomas Chenel, Les Echos, 30 septembre 2017.
  • « TF1 veut racheter Aufeminin pour accélérer dans le numérique », Caroline Sallé, A.D., Le Figaro, 12 décembre 2017.
  • « TF1 négocie le rachat d’Aufemin avec Axel Springer », Nicolas Richaud, Nicolas Madelaine, Les Echos, 12 décembre 2017.
  • « TF1 fait une offre ferme pour racheter au Feminin à Axel Springer », lesechos.fr, 12 décembre 2017.
Professeur à Aix-Marseille Université, Institut méditerranéen des sciences de l’information et de la communication (IMSIC, Aix-Marseille Univ., Université de Toulon), École de journalisme et de communication d’Aix-Marseille (EJCAM)

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