Facebook payera 750 millions de dollars de dommages et intérêts, sans pour autant qu’aucune malversation soit reconnue comme c’est généralement le cas dans ce type d’accord proposé au juge.
Le nombre de personnes concernées par cette affaire équivaut à la population d’un grand pays européen : 87 millions de personnes, pas moins, dont les données personnelles ont été aspirées via le réseau social par Cambridge Analytica, entreprise britannique spécialisée dans le marketing politique. Le groupe Facebook, devenu Meta, a été sanctionné par une amende de 5 milliards de dollars par la FTC (Federal Trade Commission) en juillet 2019 pour manquement à la protection de la vie privée de ses utilisateurs (voir La rem n°52, p.77). En conséquence, Facebook s’est vu contraint de bloquer l’accès aux données de ses utilisateurs par les milliers d’applications susceptibles de les exploiter, ainsi que d’en restreindre l’usage pour les développeurs.
Pour les internautes américains victimes de ce scandale, c’est le 22 décembre 2022 qu’est arrivé enfin à son terme le procès en nom collectif intenté en 2018 à l’encontre de Facebook. Ils réclamaient des dommages et intérêts pour atteinte aux règles de protection de la vie privée. Pour rappel, leurs données ont été collectées et exploitées, sans leur consentement, par une entreprise tierce, en l’occurrence Cambridge Analytica, dans le but d’influencer le vote des électeurs américains, en affinant le ciblage des publicités politiques, durant la campagne présidentielle de 2017 ayant abouti à l’élection de Donald Trump (voir La rem, n°48, p.90).
Fin août 2022, Facebook avait déposé un projet d’accord de principe auprès d’un tribunal de San Francisco, alors même qu’était programmée quelques semaines plus tard, en septembre 2022, une audition devant la justice au sujet de l’affaire Cambridge Analytica pour son patron Mark Zuckerberg et sa directrice générale (démissionnaire) Sheryl Sandberg. « Les 750 millions proposés par l’accord constituent le montant le plus élevé jamais atteint dans un procès en nom collectif sur les données privées et jamais payé par Facebook pour mettre fin [à ce type de poursuite] », argumentent les avocats dans le document remis au tribunal.
Aux membres du Congrès en 2019, Mark Zuckerberg disait avoir été informé du problème par la presse, avant de déclarer sous serment devant l’organisme fédéral de contrôle des marchés financiers (SEC – Securities and Exchange Commission) qu’il avait en fait eu connaissance, en 2017, du danger lié à l’activité de Cambridge Analytica.
À partir de septembre 2021, les « Facebook Files », des milliers de documents internes livrés à la presse par une ancienne employée du réseau social, Frances Haugen, dévoilent les pratiques nuisibles du réseaux social liées notamment à une absence délibérée de modération des contenus. Le scandale Cambridge Analytica est alors apparu comme la partie émergée de l’iceberg.
Sources :
- « Scandale Cambridge Analytica : Facebook conclut un accord », Emmanuel Grasland, Les Échos, 29 août 2022.
- « Affaire Cambridge Analytica : Facebook accepte de payer 725 millions de dollars pour mettre fin au procès », AFP et Reuters, Le Monde, 23 décembre 2022.