Après la révélation de piratages à répétition de comptes d’utilisateurs, Yahoo! a dû concéder à Verizon un rabais pour son rachat, lequel fait naître un géant intégré dans l’internet mobile, les contenus et les services en ligne.
L’annonce, le 25 juillet 2016, du rachat de Yahoo! par Verizon pour 4,83 milliards de dollars (voir La rem n°40, p.61) laissait imaginer que la fusion des actifs grand public de l’ancienne star du web avec ceux d’AOL, déjà rachetés par Verizon en 2015 (voir La rem n°34-35, p.47), allait être rapide et sans heurts. Mais c’était sans compter sur les révélations, en septembre et décembre 2016, concernant des piratages massifs de comptes d’utilisateurs de Yahoo! (voir La rem n°41, p.62). Or, l’accord de rachat conclu entre Yahoo! et Verizon comportait une clause permettant à Verizon de renoncer au rachat si un événement pouvait « raisonnablement être considéré comme susceptible d’avoir un effet matériel adverse ». Révéler le piratage de plus d’un milliard de comptes d’utilisateurs entre dans cette catégorie d’événements susceptibles de remettre en question le rachat, même si Yahoo! a depuis fait connaître l’absence de réactions importantes de la part de ses utilisateurs, les piratages datant de 2013 et de 2014.
Il reste que Verizon a souhaité renégocier les termes de l’opération et, le 21 février 2017, les deux groupes ont annoncé s’être entendus sur un prix de cession diminué de 350 millions de dollars. Verizon va donc racheter les actifs grand public de Yahoo! pour 4,48 milliards de dollars, et non 4,83 milliards de dollars comme c’était initialement prévu. La cession sera officielle après le 8 juin 2017, date à laquelle les actionnaires de Yahoo! doivent se prononcer sur la vente des activités grand public du groupe. En se séparant de ses activités grand public, Yahoo! va également se séparer de Marissa Mayer, appelée en 2012 pour relancer l’ancienne gloire du web (voir La rem n°24, p.34). Tim Amstrong, qui dirigeait AOL avant son rachat par Verizon et qui a depuis été confirmé à son poste chez l’opérateur mobile, prendra également la direction des activités de Yahoo!. Les autres actifs de Yahoo!, non concernés par la transaction, à savoir Yahoo! Japan et la participation dans Alibaba, seront regroupés dans une société baptisée Altaba Inc. L’entreprise Yahoo! va ainsi disparaître, même si la marque sera conservée par Verizon.
Le premier opérateur mobile américain a en effet annoncé en avril 2017 qu’il allait fusionner les actifs d’AOL et de Yahoo! dans un ensemble unique baptisé Oath, les marques AOL et Yahoo! restant toutefois exploitées, à savoir principalement les portails éponymes, les services de messagerie et le moteur de recherche pour Yahoo!. Mais le nouvel ensemble abritera d’autres marques prestigieuses, notamment dans les contenus, avec le Huffington Post, Engadget ou TechCrunch, issus d’AOL, et dans les réseaux sociaux, avec Flickr ou Tumblr, issus de Yahoo!. L’ensemble représentera 1,3 milliard d’utilisateurs par mois, de quoi proposer une alternative à Facebook et Google auprès des annonceurs, notamment sur le marché américain, où le moteur de recherche de Yahoo! reste utilisé. Ce choix sera d’autant plus crédible aux États-Unis que les opérateurs sont, depuis le 4 avril 2017, autorisés à exploiter et commercialiser les données de leurs abonnés sans l’autorisation préalable de ces derniers. À cet égard, la publicité sur les sites et services de Yahoo! ou d’AOL pourra s’appuyer sur des données personnelles issues de la consommation mobile et internet des abonnés Verizon. L’ensemble Verizon-AOL-Yahoo! fait ainsi émerger un groupe convergent, Verizon étant leader de l’internet mobile aux États-Unis et AOL-Yahoo! un géant des contenus et services en ligne, hors recherche et réseaux sociaux. L’intégration de ces activités doit, selon Tim Armstrong, « permettre à Yahoo! de révéler son potentiel », les contenus et services de Yahoo! pouvant être offerts aux 140 millions d’abonnés Verizon.
Sources :
- « Verizon aurait obtenu un rabais de Yahoo! », Elsa Braun, Le Figaro, 17 février 2017.
- « Yahoo! casse les prix pour se vendre à Verizon », Elsa Conesa, Les Echos, 22 février 2017.
- « Yahoo! et AOL bientôt réunis dans une nouvelle entreprise », Elsa Trujillo, Le Figaro, 5 avril 2017.