Fragilisé par la chute de ses revenus publicitaires et une dette issue du rachat de l’espagnol Recoletos, le groupe italien RCS Mediagroup a été « sauvé » par Fiat qui devient son actionnaire de référence, lors d’une augmentation de capital, renforçant ainsi le poids du capitalisme familial italien dans le paysage médiatique italien.
L’éditeur italien RCS Mediagroup (Rizzoli-Corriere della Serra) est, comme de nombreux groupes de presse, pénalisé par la chute du marché publicitaire depuis 2008, mais également par une lourde dette, environ 800 millions d’euros, contractée après le rachat du groupe espagnol Recoletos (Expansion, El Mundo), en 2007, pour 900 millions d’euros. Ces deux facteurs, en se renforçant, ont creusé les pertes du groupe, lesquelles se sont élevées à 509 millions d’euros en 2012, pour un chiffre d’affaires de 1,6 milliard d’euros. Le groupe, qui ne peut plus compter sur des ressources publicitaires favorables pour faire face à ses échéances, est donc aujourd’hui contraint de se délester d’une partie de ses activités. En juin 2012, il a déjà cédé pour 251 millions d’euros le groupe d’édition Flammarion à Gallimard, se retirant ainsi du marché français de l’édition (voir REM n°24, p.19). Une cession des actifs espagnols de RCS Mediagroup est également envisagée. Simultanément, en avril 2013, RCS Mediagroup a annoncé une augmentation de capital de 400 millions d’euros, doublée d’un plan sévère d’économies, avec 800 départs prévus, dont 640 en Italie, ainsi que la fermeture d’une dizaine de magazines.
C’est à l’occasion de cette augmentation de capital que le groupe Fiat, dirigé par la famille Agnelli, a confirmé le 1er juillet 2013 souhaiter doubler sa participation au sein de RCS Mediagroup, qui est ainsi passée de 10,5 % à 20,55 % du capital fin juillet. Fiat apporte 90 millions d’euros, devenant ainsi l’actionnaire de référence du groupe, alors que les banques (Mediobanca, Intesa Sanpaolo) et les grands groupes italiens présents au capital de RCS (Generalli, Pirelli, Diego Della Valle) n’ont pas tous suivi l’augmentation de capital, Mediobanca ayant même annoncé souhaiter céder ses 14 % dans RCS Mediagroup. Derrière Fiat, c’est la puissante famille Agnelli qui va présider désormais aux destinées de RCS Mediagroup, John Elkann, petit-fils de Giovanni Agnelli, lequel a fondé le constructeur automobile italien ayant indiqué son « ambition de faire de RCS le plus grand groupe de presse italien ».
RCS Mediagroup, qui édite notamment le Corriere della Sera, premier quotidien national (440 000 exemplaires) et la Gazetta dello Sport, premier quotidien sportif, pourrait à terme être rapproché de La Stampa, le quotidien contrôlé par Fiat depuis 1926, faisant ainsi du nouvel ensemble un leader de la presse quotidienne nationale italienne. John Elkann aurait ici les moyens d’imprimer sa marque dans le paysage médiatique transalpin, d’autant que son expertise en matière de presse est reconnue. Membre du conseil de The Economist Newspaper Limited, il a également rejoint le conseil du groupe de presse News Corp., issu de la session de l’empire de Rupert Murdoch. Derrière le sauvetage de RCS Mediagroup se pose toutefois la question de l’importance du capitalisme familial dans le paysage médiatique transalpin, l’équilibre entre les différents actionnaires industriels de RCS venant d’être rompu par le doublement de la participation de Fiat au capital du groupe.
Sources :
- « L’éditeur du Corriere va sacrifier 800 postes en Italie et en Espagne », Pierre de Gasquet, Les Echos, 14 février 2013.
- « Fiat au secours de la presse italienne », Pierre de Gasquet, Les Echos, 2 juillet 2013.
- Fiat vole au secours du Corriere della Sera, Alexandre Debouté, Le Figaro, 2 juillet 2013.