Le choix de la norme T-DMB en Corée du Sud, un modèle à suivre pour la RNT ?

La France a adopté en 2009 la même norme de diffusion numérique pour son nouveau système de radio numérique terrestre (RNT) que la Corée du Sud. Il existe deux normes de diffusion : le DAB+, plébiscité par la Grande-Bretagne, la Chine et la norme concurrente, le T-DMB, que la Corée du Sud a choisie dès 2001, pour la télévision mobile sur téléphone. Retour d’expérience sur un choix stratégique.

La télévision est un média omniprésent en Corée du Sud. Selon les chiffres de la Korean Broadcasting Commission (KBC), le pays compte près de 20 millions de téléviseurs pour 18 millions de ménages. Le ministère de la communication et de l’information et la Korean Broadcasting Commission (KBC), réunis dans un organisme unique de régulation, le Korea Communications Commission (KCC), sont chargés du déploiement de la norme T-DMB (Terrestrial Digital Multimedia Broadcasting), de la détermination de ses acteurs et de ses possibles évolutions.

La norme a été lancée en 2004 avec dix éditeurs de chaînes et le T-DMB est réellement déployé depuis décembre 2005, notamment à Séoul qui comprend trois sites principaux, six réémetteurs pour la région métropolitaine et 400 répéteurs dans le métro et en intérieur. Le déploiement du T-DMB s’appuie sur un important réseau dédié d’émetteurs terrestres. Pour la seule ville de Séoul, le coût de construction de ce réseau d’émetteurs se situe autour de 40 millions d’euros pour couvrir une superficie d’environ 600 km et un bassin de population d’environ 22 millions d’habitants.

Sont ainsi diffusés des chaînes de télévision, des stations de radio et des canaux de données (guide de programmes, actualités, informations trafic, etc.). Le modèle économique repose sur les revenus de la publicité, le service étant gratuit et sans abonnement pour les utilisateurs. Les services de télévision mobile et de radio numérique en T-DMB ont dépassé le million de récepteurs fin juin 2006 atteignant, en mars 2008, 13 millions (source : Arcep), avec 7 chaînes TV, dont les chaînes nationales, et 13 stations de radio, principalement sur téléphone mobile et PDA (personal digital assistant). Parallèlement, une offre payante de diffusion par satellite (S-DMB) a été lancée par TU Media, filiale de l’opérateur SK Telecom avec 15 chaînes TV et 26 stations de radio. Mais aucun de ces deux modèles n’a atteint l’équilibre.

L’offre S-DMB satisfait à peine plus d’un utilisateur sur deux. La pauvreté des contenus, et notamment l’absence des grandes chaînes nationales expliquent l’insatisfaction des abonnés au service mobile et leur faible nombre au bout de quatre années de commercialisation. D’ailleurs, selon une étude menée par Nokia durant les quatre premiers mois de commercialisation de TU Media, la pauvreté des contenus était citée comme la première cause d’abandon du service. C’est pourquoi TU Media s’apprête à diffuser des matchs de la Premier League anglaise, tandis que SK Telecom est en négociation avec HBO pour intégrer des séries premium à son offre de contenus. Une autre étude menée par TU Media relève que les abonnés regardent la télévision mobile une à deux heures par jour, en une à quatre sessions. Le nombre d’abonnés S-DMB ne progresse d’ailleurs plus, alors que TU Media estime son point mort à 5,5 millions d’abonnés. En février 2008, son chiffre d’affaires était de 244 millions de dollars.

En revanche, l’offre T-DMB apparaît davantage comme un succès, grâce notamment à l’intégration des grandes chaînes nationales dans l’offre TV et à la gratuité du service. Cependant, les recettes publicitaires globales annuelles du service sont encore inférieures à 100 millions d’euros. La technologie T-DMB ne dispose pas d’outil standardisé de mesure d’audience, ce qui ne favorise pas le développement des recettes publicitaires. Après des premiers résultats satisfaisants, une certaine lassitude semble gagner le public puisque l’audience quotidienne a diminué de 42 % à 33 % ainsi que la durée moyenne d’écoute passant de 127 minutes à son lancement à 95 minutes en 2008, d’après une étude de l’institut KOBACO.

C’est pourquoi les opérateurs de téléphonie mobile effectuent des tentatives vers un système bimode capable de recevoir à la fois TU Media et les chaînes T-DMB, allant vers la convergence des deux systèmes concurrents. D’ailleurs, SK Telecom propose à ses abonnés, depuis mars 2007, un appareil répondant à ces caractéristiques. En outre, certains aménagements du cadre réglementaire de la publicité devraient permettre à terme des applications supplémentaires génératrices de revenus.

Conseiller de programme "nouveaux contenus" chez France Ô, ancien responsable du pôle veille des usages et innovation à Radio France

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