Partout, en Europe, les groupes audiovisuels rencontrent des difficultés

Le succès, en Europe, des chaînes de la TNT, fragilise les grandes chaînes nationales, qui perdent des parts d’audience. Une évolution qui se retrouve sur le marché publicitaire et risque de s’accentuer avec la crise économique mondiale. En Allemagne, les chaînes nationales optent pour une stratégie européenne, qu’il s’agisse du groupe RTL ou de Pro7. En Grande-Bretagne, le débat est lancé sur le financement des chaînes nationales privées, soumises à des obligations spécifiques que n’ont pas les chaînes numériques. Enfin, en France, TF1 et M6 reconsidèrent leur stratégie dans un univers particulier, après la suppression de la publicité sur France Télévisions après 20 heures depuis le 5 janvier 2009.

Ces cinq dernières années auront été, pour l’audiovisuel européen, marquées par l’arrivée de concurrences nouvelles qui fragilisent les chaînes historiques issues de l’univers analogique. Partout dans les grands pays européens, la télévision numérique terrestre rencontre le succès avec son offre élargie de chaînes, ce qui érode progressivement les parts d’audience des grandes chaînes analogiques, un phénomène se répercutant ensuite sur la répartition des parts de marché publicitaire de la télévision.

La suprématie des chaînes nationales privées allemandes remise en question.

En Allemagne, les deux premiers groupes audiovisuels européens, RTL Group et ProSiebenSat.1, sont fragilisés sur leur marché d’origine, à la fois par la montée en puissance des nouvelles chaînes et par les prévisions pessimistes sur le marché publicitaire, situation qui favorise la publicité sur Internet au détriment de la télévision. RTL Group, qui a totalisé en 2008 plus de 25 % des audiences de la télévision allemande avec ses cinq chaînes gratuites, voit ainsi sa part de marché s’éroder au profit des chaînes thématiques, le paysage audiovisuel allemand allant en se morcelant. Le phénomène d’érosion des parts d’audience des grandes chaînes privées atteint davantage encore la chaîne ProSiebenSat.1, dont l’audience est passée de 9,9 % à 6,5 % entre 1995 et 2007. Ajouté au recul prévisible du marché publicitaire dès 2009, du fait de la crise économique, la fusion de ProSiebenSat.1 et SBS Broadcasting en 2007 (voir le n° 4 de La revue européenne des médias, automne 2007) se révèle aujourd’hui être un moyen pour le groupe de limiter sa dépendance au marché allemand. Toutefois, les coûts d’intégration de SBS supportés en 2008 et la baisse prévue des ressources publicitaires du groupe ont conduit ProSiebentSat.1 à lancer, dès novembre 2008, un vaste plan de restructuration de ses activités allemandes, avec la suppression de 7 % de ses effectifs, soit 255 emplois.

En Grande-Bretagne, les plans sociaux dans les grandes chaînes s’accompagnent d’une réflexion sur le financement des programmes des chaînes nationales, dans un univers concurrentiel nouveau

En Europe, la Grande-Bretagne est un cas à part. La position atypique de la BBC, financée à 100 % par la redevance pour ses activités nationales, mais dis- posant pour ses activités internationales d’une branche commerciale, BBC Worldwide, fait du fleuron de l’audiovisuel britannique l’un des acteurs les plus assurés du marché, face à la crise publicitaire qui s’annonce. Sur le plan national, l’OFCOM, le régulateur britannique, a confirmé l’attribution exclusive de la redevance à la BBC, même si la redevance n’augmentera que de 2 % en 2009 et 2010. Ce chiffre, inférieur aux attentes de la BBC, a conduit le groupe public à s’engager dans un plan de réduction d’effectifs, 2 500 postes devant être supprimés entre 2008 et 2013, dont 1 800 licenciements. Mais la ressource publique de la BBC, indépendante des évolutions du marché publicitaire, reste garantie.

Sur le marché audiovisuel britannique, l’effondrement du marché publicitaire de la télévision est d’ores et déjà annoncé, fragilisant d’abord les chaînes en clair. Le leader de la télévision payante en Grande-Bretagne, le groupe News Corp. avec son bouquet BSkyB, semble donc relativement protégé face aux trois chaînes gratuites nationales dont l’avenir est lié au marché publicitaire : la chaîne publique Channel Four, la chaîne privée Channel Five, enfin le géant privé ITV, dont la chaîne ITV1 collecte à elle seule plus de 40 % des investissements publicitaires du marché de la télévision. Pour ces trois chaînes, la crise du marché publicitaire ne vient que renforcer la chute de leurs recettes publicitaires, grignotées par les chaînes de la TNT et les chaînes thématiques distribuées sur le câble et l’Internet.

ITV est le premier groupe concerné par la chute des recettes publicitaires : à l’occasion de la présentation de ses résultats semestriels, le 6 août 2008, le groupe annonçait, sans même anticiper la crise financière qui a sévi depuis, une chute de 10 % de ses recettes publicitaires en moyenne, dont une chute spectaculaire de 20 %, prévue sur le mois de septembre, du fait de rentrées publicitaires exceptionnelles l’année précédente à l’occasion de la Coupe du monde de rugby. Afin de préserver sa capacité d’investissement dans des programmes générateurs d’audience et de viser au minimum 20 % de parts d’audience, contre un peu plus de 17 % en moyenne actuellement, le groupe annonçait simultanément le lancement d’un nouveau plan d’économies de 40 millions de livres par an jusqu’en 2010. Le 30 septembre 2008, le groupe ITV mettait en application son nouveau plan d’économies : ITV annonçait la suppression de 1 000 postes en 2009, répartis sur ses différentes activités, dont 463 postes pour la seule chaîne ITV News, consacrée à l’information, après avoir obtenu de l’OFCOM l’autorisation de limiter de 17 à 9 le nombre de ses programmes d’information régionale.

La chaîne publique Channel Four, financée intégralement par la publicité, est elle aussi victime de la concurrence exacerbée dans le marché publicitaire télévisuel britannique, notamment depuis le lancement de Channel Five en 1997. Avec 8,4 % de parts d’audience en 2007, Channel Four a de plus en plus de mal à financer ses programmes relevant des obligations de service public, à tel point que l’attribution à Channel Four d’une partie de la redevance attribuée exclusivement à la BBC a été évoquée, Channel Four ayant demandé un financement pérenne compris entre 60 et 100 millions de livres par an à l’horizon 2012. A défaut d’assurances sur son financement à terme, la chaîne a lancé, comme ITV, un plan drastique d’économies, qui s’est traduit par l’annonce, en septembre 2008, de la suppression de 150 postes sur un effectif total de 1 000 employés. Entre septembre 2007 et septembre 2008, Channel Four a en effet été confrontée à une chute de 17 % de ses ressources publicitaires, qui l’oblige à revoir sa stratégie.

Le financement des chaînes privées britanniques est devenu un enjeu national après la parution, le 21 janvier 2009, d’un rapport de l’OFCOM détaillant les obligations des chaînes nationales britanniques financées par la publicité : ITV, Channel Four et Channel Five. En effet, ces chaînes ont chacune des obligations de service public, comme l’information régionale pour ITV, les quotas d’émissions éducatives et de documentaires produits en Grande-Bretagne pour Channel Four. L’OFCOM considère que les chaînes nationales auront de plus en plus de mal à financer ces obligations, notamment à l’horizon 2012, quand le basculement définitif de la diffusion audiovisuelle de l’analogique au numérique va mettre en concurrence directe les chaînes historiques avec les nouvelles chaînes de la TNT britannique. L’OFCOM estime à 250 millions d’euros le manque de ressources des chaînes nationales pour financer leurs obligations de service public. Critique en particulier pour Channel Four, cette situation a conduit l’OFCOM à recommander une évolution du statut de Channel Four. Celle-ci verrait ses obligations de service public renforcées, alors que Channel Five et ITV n’en auraient presque plus, en échange de quoi Channel Four serait adossée soit à BBC Worldwide, soit à Channel Five, détenue par RTL Group. Les dirigeants de Channel Five, la plus petite des chaînes nationales, avec 5,1 % de parts d’audience en 2007, ont d’ores et déjà apporté leur soutien à une fusion avec Channel Four. Sans aucun doute, le rapprochement de Channel Four et de BBC Worldwide a également son intérêt, d’abord parce qu’il s’agit des deux entités de service public financées exclusivement par le marché, l’une sur le marché national, l’autre à l’international, ensuite parce que BBC Worldwide affiche une excellente santé. Positionnée sur les marchés internationaux, BBC Worldwide a réalisé un chiffre d’affaires de 1,1 milliard d’euros en 2007, en hausse de 13 % sur un an, notamment grâce au succès à l’exportation de ses programmes et magazines. Dans les faits, des passerelles existent déjà entre BBC WorldWide et Channel Four, les deux chaînes s’étant rapprochées, fin janvier 2009, pour envisager une offre commune pour le rachat au groupe Virgin Media des 50 % de capital qu’il détient dans le bouquet de chaînes thématiques UKTV.

En France, la suppression de la publicité sur France Télévisions déstabilise le marché publicitaire, où TF1 est de moins en moins puissant

Au même titre que le marché britannique avec la BBC, le marché audiovisuel français est en Europe un cas d’exception, caractérisé notamment par la suprématie de la chaîne privée TF1 en matière d’audiences et de recettes publicitaires, la chaîne étant la plus regardée d’Europe. Depuis l’ouverture des écrans à la publicité en 1968, la chaîne TF1, privatisée en 1987, bénéficie en effet d’une prime au leader grâce à ses larges audiences, qui lui permet de s’arroger régulièrement plus de 50 % des investissements publicitaires audiovisuels. Reste que le modèle mis en place par TF1 se fissure : au recul des audiences, à la montée en puissance des chaînes de la TNT, s’ajoute un marché publicitaire français de la télévision perturbé par les tarifications nouvelles tentées en 2008 et par la suppression, après 20 heures et jusqu’à 6 heures du matin, de la publicité sur les chaînes de France Télévisions depuis le 5 janvier 2009.

Pour TF1, l’enjeu est d’abord de stabiliser son audience et de conserver face à M6 et France 2 un écart constant en points d’audience lui permettant de préserver son statut de leader. Depuis l’arrivée de Nonce Paolini à la tête de TF1, la chaîne tente de rajeunir sa cible, stratégie qui est passée notamment par le remplacement, le 25 août 2008, de Patrick Poivre d’Arvor, figure nationale du journal de 20 heures de la première chaîne, par Laurence Ferrari, plus jeune, et considérée en outre comme plus impertinente après son passage sur Canal+. La chute des audiences aura été brutale sur ce carrefour d’audience stratégique pour TF1, ce qui n’a pas empêché la chaîne de maintenir ses recettes publicitaires autour du JT de 20 heures face à celui concurrent de France 2 qui, concerné par la suppression de la publicité sur les chaînes publiques au 5 janvier 2009, ne pouvait attirer les annonceurs, assurés d’avoir à repenser leur plan média quelques mois plus tard. C’est bien finalement l’instabilité du marché publicitaire audiovisuel français qui protège pour l’instant TF1, les annonceurs bénéficiant, malgré les difficultés de la chaîne, d’un support performant et connu dans un univers de marché plutôt mouvant. En effet, le marché publicitaire audiovisuel français se caractérise par une évolution rapide du cadre réglementaire et par l’apparition de tarifs commerciaux nouveaux, jusqu’ici inconnus des annonceurs télé. Ainsi, le 1er janvier 2007, l’ouverture de la publicité télévisée à la distribution créait un appel d’air sur le marché publicitaire audiovisuel français où arrivaient pour la première fois des annonceurs parmi les plus puissants. Cet effet d’aubaine aura été vite oublié, dès le début de l’année 2008, où les bouleversements annoncés du paysage audiovisuel français se sont multipliés. Début 2008, France Télévisions lançait un nouveau système de tarification de ses écrans, baptisé Horizon, où les écrans étaient vendus en net, sans négociation sur les prix affichés en brut, qui correspondent pourtant à l’outil de travail des annonceurs, tout en séparant les tarifs des spots de la prise en compte des audiences. Les contre-performances de ce nouveau système de tarification, auxquelles s’est ajoutée, dès janvier 2008, la perspective de la suppression de la publicité sur France Télévisions, sans connaître les modalités, ni le calendrier de cette suppression, ont à l’évidence favorisé l’attentisme des annonceurs. Autant dire que la stabilisation du marché, sur les fondements du nouveau cadre juridique, risque d’accélérer les tendances déjà constatées sur le marché audiovisuel, où la chute des audiences des chaînes nationales au profit des chaînes de la TNT s’accompagne d’une nouvelle répartition des recettes publicitaires et de concurrences nouvelles sur toutes les tranches horaires de la journée, les parts de marché perdues en prime time conduisant les chaînes à optimiser leurs écrans tout au long de la journée, sur des tranche horaires auparavant jugées moins stratégiques.

Pour TF1, qui bénéficie avec M6 d’être intégrée par tout annonceur important dans son plan média après 20 heures, la stabilisation de sa part de marché constitue un défi important pour les années à venir. L’audience de la première chaîne, systématiquement supérieure à 30 % jusqu’en 2007, a brutalement chuté de 3,5 points en 2008 pour s’établir à 27,2 % de parts de marché. Les équilibres du marché publicitaire entre chaînes privées sont toujours respectés, l’écart d’audience entre TF1, M6 et les chaînes de France Télévisions n’évoluant pas significativement. En revanche, les chaînes de la TNT fragilisent par leur succès les audiences les plus fortes des chaînes privées, conduisant à un morcellement relatif des parts de marché.

Ainsi, les chaînes de la TNT ont doublé leur audience en 2008 pour atteindre ensemble 11,1 % de parts de marché selon Médiamétrie. Face à cette nouvelle concurrence,pour TF1 comme pour M6, l’enjeu est de se renforcer sur ses points faibles, là où les annonceurs sont les plus susceptibles de céder aux tarifs attractifs des chaînes de la TNT. Les deux chaînes ont ainsi repensé leur grille de programmes, l’adaptant par la même occasion au nouveau contexte horaire proposé par France Télévisions depuis le 5 janvier 2009 avec la suppression de la publicité.

Avec 96 des 100 meilleures audiences de l’année, TF1 est le leader incontesté du prime time, même si M6 parvient parfois à dépasser la première chaîne. Forte de cette domination, TF1 n’a d’ailleurs pas modifié ses horaires après 20 heures, ne tenant pas compte du lancement de la première partie de soirée par France Télévisions dès 20 h 35, alors même que commence sur TF1 le « tunnel » publicitaire autour de la météo, une des périodes les plus rentables pour la chaîne. TF1 compte également sur la disparition des écrans publicitaires de France 2 après 20 heures pour imposer aux annonceurs un rapport de force toujours très favorable, ce qui a conduit la première chaîne à augmenter ses tarifs, le prime time de TF1 étant désormais, avec la disparition de la publicité sur France 2, le seul support national capable de toucher simultanément et de manière répétée plusieurs millions de Français. La rareté constatée actuellement de l’offre publicitaire après 20 heures sur les chaînes nationales pourrait toutefois être relativisée si la nouvelle loi audiovisuelle autorisait une seconde coupure dans les œuvres audiovisuelles et cinématographiques.

Pour la journée, TF1 a en revanche choisi de baisser de 3 à 4 % les tarifs de ses écrans publicitaires pour les rendre plus attrayants, tout en mettant en place une programmation nouvelle, notamment le matin, tranche horaire jusqu’ici délaissée par la chaîne. En effet, la publicité sur France Télévisions étant toujours autorisée pendant la journée jusqu’à fin 2011 et les chaînes de la TNT étant performantes en journée du fait de leur programmation plus ciblée, se renforcer sur le day time apparaît pour TF1 comme un moyen de compenser les baisses d’audience constatées le soir. Alors que la première chaîne se contentait de rediffuser des soap opera américains pendant la matinée, laissant France 2 s’imposer en début de journée avec « Télé Matin », la première chaîne a lancé, début novembre 2008, un magazine baptisé « 10 heures le mag », programmé juste à la fin de « Télé Matin ». Avec cette nouvelle grille de programmes, TF1 tente certes de récupérer les téléspectateurs de France 2, mais la le chaîne renforce également sa marque en proposant un programme avec des animateurs identifiés à la chaîne, qui peuvent ainsi contrebalancer par leur notoriété les rediffusions souvent proposées sur les chaînes de la TNT.

De son côté, M6 résiste mieux que TF1 à l’érosion de ses audiences, limitée à 0,5 point en 2008, pour une audience moyenne de 11 %. En effet, la chaîne est parvenue, grâce à ses investissements dans le football européen, à détrôner TF1 pour la meilleure audience de l’année avec la diffusion du match France–Italie le 17 juin 2008, à l’occasion de la Coupe d’Europe de football. Ces performances, sur le sport notamment, ont permis à la chaîne de limiter à 2,6 % le recul de ses recettes publicitaires en 2008, qui se sont élevées à 658 millions d’euros.

A l’instar de TF1, M6 joue la carte de la marque pour se protéger des concurrences nouvelles des chaînes de la TNT, en programmant des émissions avec des présentateurs identifiés à la chaîne, mais également en déployant une stratégie « multichaîne » associée à son univers. Alors que TF1, présent sur la TNT avec TMC et NT1, peine à donner l’image d’un média global dans un univers média élargi, M6 multiplie au contraire les rediffusions avec W9, la chaîne TNT du groupe, où l’on retrouve également un univers graphique, des animateurs ou des programmes semblables. Cette stratégie de marque s’est encore illustrée dans le secteur des chaînes thématiques où M6 a décidé d’arrêter la diffusion de Fun TV, qui a cessé d’émettre le 31 décembre 2008, ainsi que de M6 Music Rock, pour lancer une chaîne musicale générique, M6 Music Club, le 20 janvier 2009. Pour M6, l’enjeu est de simplifier son offre et de l’identifier à sa marque. En définitive, le groupe défend une approche où l’audience globale de son pool de chaînes se maintient, plutôt que de se focaliser sur le seul vaisseau amiral du groupe, la chaîne M6. Sont donc considérées aussi comme stratégiques et complémentaires, outre M6 en analogique, les chaînes W9 sur la TNT gratuite, Paris Première sur la TNT payante et Téva sur le câble et satellite.

Pour TF1 et M6, l’année 2009 s’annonce assurément difficile, malgré les recettes publicitaires supplémentaires attendues de la fin de la publicité sur France Télévisions après 20 heures. A l’érosion des audiences, inévitable dans la mesure où la consommation de télévision s’ajuste progressivement à une offre élargie, s’ajoute en effet un marché publicitaire déprimé par la crise économique mondiale, qui favorise en retour les chaînes de la TNT et leurs tarifs publicitaires bradés comparés aux chaînes nationales. Le premier bilan publicitaire établi fin janvier 2009, après la suppression de la publicité sur France Télévisions, est à cet égard riche d’enseignements. Une étude menée par l’institut Yacast, entre le 5 et le 25 janvier 2009, révèle ainsi que le marché publicitaire audiovisuel est en repli de 7 % sur la période. Ce repli global masque par ailleurs de nombreuses disparités. La publicité low cost a les faveurs des annonceurs, le chiffre d’affaires publicitaire des chaînes de la TNT étant en augmentation de 78 % pendant cette période par rapport au mois de janvier 2007. En revanche, les chiffres d’affaires publicitaires de TF1 et M6 sont en recul, respectivement de 16 % et 8 %. Pour TF1, la suppression de la publicité sur France Télévisions a eu incontestablement un effet bénéfique, le recul de ses recettes n’étant que de 6 % après 20 heures, contre un recul très important de 26 % avant 20 heures.

Pour M6, l’effet inverse est constaté : M6 profite de la suppression de la publicité sur France Télévisions, le nombre et la durée des messages publicitaires diffusés après 20 heures augmentant, alors que les revenus publicitaires chutent sur cette tranche horaire de 15 %, M6 bradant ses écrans face à TF1. A l’inverse, les recettes publicitaires de M6 baissent seulement de 6 %, la chaîne étant parvenu à augmenter son chiffre d’affaires publicitaire en journée. Pendant cette période de janvier, ce sont donc les chaînes de la TNT qui profitent du nouveau contexte publicitaire, notamment par une augmentation significative de leurs tarifs : la hausse de leurs recettes de 78 % en valeur ne s’accompagne en effet que d’une hausse de 19 % en volume des messages diffusés. Enfin, le grand bénéficiaire de la suppression de la publicité sur France Télévisions est la chaîne Canal+ : sa tranche en clair, avec l’émission le « Grand Journal », s’impose pour les annonceurs comme un relais alternatif de communication nationale, les investissements publicitaires sur la chaîne augmentant de 26 % après 20 heures.

Sources :

  • « Tunnel sans pub pour Channel 4 », Jean-Hébert Armengaud, Libération, 29 septembre 2008.
  • « ITV axes 1,000 jobs in drive to save £40m a year », Mark Swenev, The Guardian, September 30 2008.
  • « ITV prévoit de supprimer 1000 postes d’ici le début 2009, dont 430 au sein d’ITV News », La Correspondance de la Presse, 1er octobre 2008.
  • « Les chaînes de télévision revoient leur stratégie commerciale », Paule Gonzalès, Le Figaro, 8 octobre 2008.
  • « TF1 se lance dans la bataille du matin pour regagner des points », Nathalie Silbert, Les Echos, 6 novembre 2008.
  • « TF1 : stabilité des recettes publicitaires autour du JT de Laurence Ferrari », AFP, tv5.org, 18 novembre 2008.
  • « La BBC Worlwide remet en cause le modèle de la BBC », Ben Feton, Courrier International, 27 novembre – 3 décembre 2008.
  • « Premiere décroche les droits du foot allemand », Caroline Bruneau, Le Figaro, 29 novembre 2008.
  • « M. Thomas Ebeling, jusqu’à présent membre du directoire de Novartis, en charge des activités de parapharmacie, est nommé président-directeur général de ProsiebenSat.1 », La Correspondance de la Presse, 10 décembre 2008.
  • « M6 ravit la palme des audiences 2008 à TF1 », Marie-Catherine Beuth, Le Figaro, 30 décembre 2008.
  • « M6 arrête la diffusion de Fun Tv et M6 Music Rock », Guy Dutheil, Le Monde, 31 décembre 2008.
  • « TF1 gagne 96 des 100 meilleures soirées TV de l’année », Jean- Baptiste Jacquin, La Tribune, 2 janvier 2009.
  • « Recul des recettes publicitaires de M6 », J.H., La Tribune, 21 janvier 2008.
  • « M6 a plutôt bien résisté en 2008 », N.S., Les Echos, 21 janvier 2009. – « Le sort de Channel 4 sur la sellette à Londres », Eric Albert, La Tribune, 22 janvier 2009.
  • « Alliance BBC / Channel 4 pour acquérir la part de Virgin Media dans UKTV », La Correspondance de la Presse, 27 janvier 2009.
  • « Poursuite de la baisse de la publicité sur TF1 et M6, sur les trois premières semaines de janvier (Yacast) », La Correspondance de la Publicité, 30 janvier 2009.
Professeur à Aix-Marseille Université, Institut méditerranéen des sciences de l’information et de la communication (IMSIC, Aix-Marseille Univ., Université de Toulon), École de journalisme et de communication d’Aix-Marseille (EJCAM)

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