L’introduction en Bourse du groupe Internet AOL signe sa séparation définitive avec Time Warner

Annoncée le 28 mai 2009 par Jeff Bewkes, le PDG de Time Warner, la scission du groupe de médias avec sa filiale AOL est effective depuis le 9 décembre 2009, date de son introduction en Bourse.

Avec une capitalisation boursière oscillant, selon les estimations, entre 2,3 et 2,8 milliards de dollars le jour de son introduction, AOL quitte le giron du groupe dont elle s’était emparée pour 163 milliards de dollars dix ans plus tôt, en 2000, à l’époque de la bulle boursière sur les valeurs technologiques. La société, fleuron de l’Internet de la fin des années 1990, voit ainsi sa valeur diminuer de nouveau : valorisée 20 milliards de dollars lors de l’entrée de Google à son capital en 2005, elle pesait encore 5,66 milliards de dollars fin 2008 lorsque Time Warner a racheté à Google les 5 % de capital qu’il détenait dans AOL (voir le n°12 de La revue européenne des médias, automne 2009).

Désormais coté, le groupe AOL va devoir renouer rapidement avec la rentabilité. Si son chiffre d’affaires baisse dans la mesure où le groupe ne cherche pas à conserver ses abonnés Internet, reste qu’il devra tailler dans ses effectifs importants, hérités de ses années fastes, pour se concentrer sur ses activités de portail et de régie en ligne. Juste avant son introduction en Bourse, le groupe a ainsi mis en place un plan de départs volontaires pour supprimer 2 500 de ses 6 900 employés, essentiellement aux Etats-Unis où AOL compte 4 500 employés. Faute de candidats en nombre suffisant pour le départ, AOL a dû, le 10 janvier 2010, recourir aux licenciements et décider de fermer certains de ses bureaux à l’étranger : l’Espagne et la Suède sont les premiers pays touchés, la France et l’Allemagne pourraient également être concernées. A terme, la baisse de ses effectifs devrait permettre à AOL – qui comptait plus de 19 000 employés en 2006 – d’économiser chaque année près de 300 millions de dollars. Restera alors au groupe à proposer en ligne une offre qui saura faire la différence en fidélisant une audience importante et qualifiée, susceptible d’attirer les annonceurs.

Bien que disposant d’une marque forte, AOL manque aujourd’hui de visibilité, son audience se répartissant sur 80 sites différents, dont AOL Instant Messenger, son service de messagerie instantanée. Alors qu’il ambitionne d’être un producteur de contenus exclusifs et fédérateurs sur Internet, stratégie qui a déjà échoué à l’époque de la fusion avec Time Warner, AOL devra s’imposer comme l’un des principaux portails et services de courrier électronique du marché américain, aux côtés notamment de Yahoo!, qui a adopté la même stratégie depuis qu’il a confié à Microsoft ses activités de recherche en ligne. Pour s’imposer, AOL peut compter sur ses journalistes, le groupe produisant à lui seul entre 70 % et 80 % de l’information qu’il diffuse, et sur les fonds dégagés par certaines de ses activités hors contenu dont il se débarrasse pour financer sa nouvelle stratégie. Ainsi, la semaine suivant son introduction en Bourse, AOL annonçait être en pourparlers avec le groupe russe Digital Sky Technologies (DST) pour lui revendre sa messagerie instantanée ICQ , leader en Russie mais dépassée par AOL Instant Messenger aux Etats-Unis. MapQuest, le service de cartographie et d’itinéraires en ligne d’AOL, est également en vente.

Sources :

  • « AOL se rêve en poids lourd des médias sur Internet », Eric Chalmet, La Tribune, 18 novembre 2009.
  • « AOL sort de Time Warner et se sépare d’un tiers de ses effectifs », Pierre de Gasquet, Les Echos, 20 novembre 2009.
  • « AOL taille au pas de charge dans ses effectifs », Marie-Catherine Beuth, Le Figaro, 20 novembre 2009.
  • « AOL se cherche un nouvel avenir à Wall Street », Laetitia Mailhes, Les Echos, 9 décembre 2009.
  • « AOL négocie la vente de sa messagerie ICQ à un groupe d’investissement russe », Laetitia Mailhes, Les Echos, 15 décembre 2009.
  • « Etats-Unis : AOL passe aux licenciements par manque de volontaires au départ », AFP, 11 janvier 2010.
  • « AOL ferme son bureau en France », Marie-Catherine Beuth, Le Figaro, 11 janvier 2010.

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