Intitulée « Les bons comptes feraient les bons amis », une étude de la Société civile des auteurs multimédia (Scam) dresse un état des lieux inquiétant concernant la rémunération des auteurs, les pratiques de reddition des comptes et l’évaluation du travail des éditeurs.
Alors que se tenait à Paris, en mars 2010, le Salon du livre, la Scam (Société civile des auteurs multimédia), qui compte quelque 6 000 écrivains français parmi ses 28 000 membres (réalisateurs, auteurs, traducteurs, journalistes, vidéastes, photographes et dessinateurs), présentait les résultats de son enquête menée pour la deuxième année consécutive sur les relations entre les écrivains et leurs éditeurs. L’étude s’appuie sur un questionnaire envoyé par la Scam, auquel ont répondu plus de 500 auteurs, entre le 1er décembre 2009 et le 31 janvier 2010.
La rémunération des auteurs
L’étude révèle que la quasi-totalité des auteurs (96 %) ne fait pas appel à un agent littéraire et qu’un sur trois seulement considère qu’un intermédiaire pourrait les aider à mieux négocier leur contrat d’édition. Un auteur sur deux ne négocie pas le taux proposé par l’éditeur. Conformément au code de la propriété intellectuelle (CPI, art. L 131-4), les droits d’auteur sont calculés sur le prix de vente HT au public, soit 80 % des cas. Seuls 13 % des auteurs sont rémunérés au forfait, et 4 % touchent des droits calculés sur le prix de gros, ce qui constitue une infraction au CPI. La grande majorité des auteurs perçoit entre 5 % et 12 % du prix de vente. Ils étaient 75 % en 2010, contre 70 % en 2009. Mais la proportion des auteurs touchant plus de 12 % du prix de vente est en baisse, 7 % en 2010 contre 10 % en 2009. Le nombre de ceux qui reçoivent moins de 5 % est ainsi passé de 20 % en 2009 à 18 % en 2010. Plus des deux tiers (68 %) des contrats comportent un à-valoir. Si la proportion d’à-valoir supérieurs à un montant de 3 000 euros augmente en 2010, avec 37 % des cas contre 32 % en 2009, l’écart entre les montants s’accentue. Les à-valoir compris entre 1 500 et 3 000 euros constituent 33 % des cas en 2010 contre 43 % en 2009 et ceux dont le montant est inférieur à 1 500 euros représentent 30 % des cas contre 25 % en 2009.
Les pratiques des éditeurs
Moins de la moitié (46 %) des éditeurs respecte l’obligation légale de la reddition des comptes (art. L132-13 du CPI) et 18 % ne s’y prêtent jamais. Lorsque celle-ci est effectuée, elle s’accompagne d’un règlement des droits dans 47 % des cas seulement. En outre, la moitié des auteurs déclare devoir réclamer les comptes, que la loi impose pourtant à l’éditeur de fournir chaque année, et estime que les relevés de comptes transmis ne sont ni clairs, ni complets.
Plus grave, l’enquête de la Scam révèle des pratiques que l’on pourrait qualifier d’inacceptables. Un quart des auteurs a découvert que leur livre avait été édité à l’étranger sans en avoir été informé par l’éditeur. Près d’un tiers des auteurs (30 %) n’a pas reçu de droits à la suite d’une adaptation audiovisuelle de leur ouvrage ou d’une exploitation à l’étranger. De même, 28 % des auteurs n’ont pas été informés de la mise au pilon de leur livre.
Ce que les auteurs pensent de leurs éditeurs
Malgré tous ces manquements, il peut sembler paradoxal de constater que 69 % des auteurs se déclarent satisfaits des relations avec leurs éditeurs en 2010, contre 60 % en 2009. Néanmoins, ce jugement est à nuancer : ainsi, à propos des contrats proposés ou encore de la collaboration sur le travail de création, plus de la moitié des auteurs attribue à leur éditeur une note supérieure ou égale à 6 sur 10 ; en revanche, lorsqu’il s’agit de noter l’exploitation commerciale ou la communication et la promotion des livres, les deux tiers des auteurs donnent une note inférieure ou égale à 5 sur 10. Le Baromètre 2010 de la Scam conclut avec cet appel : l’heure du livre numérique, un tel constat rend urgente une évolution vers plus de transparence et donc plus de confiance dans les relations que nouent les éditeurs avec leurs auteurs.
Source :
- « Le Baromètre 2010 des relations Auteurs/Editeurs. Les bons comptes feraient les bons amis », dossier de presse, Scam, scam.fr, 18 mars 2010.