Dégradation du réseau téléphonique en cuivre

Voué à disparaître, le réseau de cuivre offre une qualité de service téléphonique fortement dégradée. En 2021, plus de 20 millions de lignes dépendent toujours du réseau historique en cuivre. Mais depuis plusieurs années, 17 départements sont victimes de pannes de téléphone récurrentes dues à de multiples incidents, tels des poteaux renversés ou des fils coupés, pour lesquels la réparation intervient souvent au bout de plusieurs semaines. Face au nombre croissant de plaintes émanant d’habitants ou d’élus, principalement de communes rurales, deux enquêtes ont été diligentées par l’Arcep en 2014. Opérateur prestataire du service universel du téléphone, Orange a reçu une mise en demeure de l’Arcep en 2018, pour manquement à ses obligations. L’année suivante, l’opérateur avait dû embaucher des techniciens supplémentaires.

En décembre 2020, dans Le Journal du dimancheune tribune signée par 215 maires et élus réclamant que soient pris en considération les « oubliés du téléphone fixe » relance la polémique. Orange explique investir 500 millions d’euros par an dans l’entretien du réseau historique, vieux de plus de cinquante ans. L’opérateur requiert auprès du régulateur une augmentation du prix de la location de ses lignes (tarif de dégroupage fixé par l’Arcep à 9,65 euros par ligne et par mois). En effet, l’apport de cette redevance, que lui reversent les opérateurs concurrents, diminue à mesure que les abonnés ADSL migrent vers la fibre optique.

La négociation est d’autant plus délicate pour le gouvernement que la convention qui liait Orange, entreprise privée, l’obligeant au maintien d’un service universel assurant à 85 % des Français de pouvoir être dépannés sous 48 heures, a pris fin en décembre 2020. Les nouvelles conditions d’exercice du service universel ont été inscrites dans la loi dite DDADUE du 3 décembre 2020, mais leur mise en œuvre n’est pas encore à l’ordre du jour. À l’avenir, le service universel sera mutualisé et applicable à l’ensemble des réseaux – cuivre, mobile, fibre optique, satellite –, avec l’obligation de fournir un accès internet à haut débit.

À l’initiative de l’Assemblée nationale et de Cédric O, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique, une « mission flash », confiée à la députée LREM Célia de Lavergne, formule dix propositions présentées en février 2021. Pour sortir de l’impasse, la députée propose notamment la reprise du contrat de service universel du téléphone par Orange pour le cuivre aussi longtemps que les petites communes en dépendent, en attendant la fibre optique ou le réseau mobile, donc au moins jusqu’en 2025. Elle envisage également d’imposer à l’opérateur une obligation de raccordement dans un délai de deux à quatre mois (au lieu de six mois aujourd’hui) et une obligation de réparation sous un mois, avec des pénalités au prorata des jours d’interruption de service.

En mai 2021, le gouvernement et Orange ont annoncé leur accord. L’opérateur télécoms s’est finalement engagé à investir davantage dans la maintenance préventive, ajoutant 10 millions d’euros aux 100 millions d’euros qu’il y consacre annuellement et aux 400 millions destinés aux réparations. Orange participera également aux comités de concertation mis en place dans les dix-sept départements particulièrement démunis, rassemblant chacun, préfet, maires et parlementaires, afin que soient identifiés en amont les risques d’incidents. En outre, l’opérateur sera tenu de trouver, dans les 24 heures, une solution alternative (téléphone mobile, satellite) en cas de coupure de téléphone. Enfin, plus d’une centaine de techniciens d’intervention seront embauchés, complétant l’effectif existant de 1 800 personnes.

Dans moins de dix ans, en 2030, le réseau de cuivre sera de l’histoire ancienne en France, lorsque son propriétaire, l’opérateur Orange, l’aura entièrement remplacé par la fibre optique. Une première expérimentation a été menée dans le département des Yvelines où la commune de Lévis-Saint-Nom fut la première, en avril 2021, à abandonner définitivement le réseau de cuivre au profit de la fibre optique, à laquelle était déjà raccordée la quasi-totalité des 1 700 habitants. Effective à partir de 2023, la suppression des lignes de cuivre – un million de kilomètres de câble à démanteler – réduira, au moins par dix, la consommation d’énergie.

Sources :

  • « Une députée prône des amendes contre les pannes du réseau cuivre d’Orange »,
    Raphaël Balenieri et Sébastien Dumoulin, Les Echos, 11 février 2021.
  • « Les plans de Matignon pour résoudre les pannes de réseau cuivre d’Orange », Raphaël Balenieri et Sébastien Dumoulin, Les Echos, 4 mai 2021.
  • « Le démontage progressif du réseau historique », S. Dum, Les Echos, 4 mai 2021.
  • « Orange s’engage sur l’amélioration de son vieux réseau cuivre », Sébastien Dumoulin, Les Echos, 25 mai 2021. 
Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

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