L’audiovisuel britannique en effervescence : Murdoch entre au capital d’ITV et vole son président à la BBC

Richard Branson, patron du groupe Virgin et premier actionnaire de la chaîne privée ITV, devra désormais compter avec Rupert Murdoch qu’il affectionne peu. En effet, le 21 novembre 2006, la première chaîne commerciale britannique a rejeté l’offre de fusion du cablô-opérateur NTL après que James Murdoch, le fils cadet du magnat australien des médias, s’est emparé, le 17 novembre, de 17,9 % du capital d’ITV. A travers Virgin, NTL compte saisir les autorités de la concurrence à Londres et à Bruxelles pour s’opposer à cette prise de participation. Le Communication Act de juillet 2003 autorisant une participation inférieure à 20 % du capital d’une chaîne de type 3 (dont ITV) pour les groupes contrôlant plus de 20 % du marché national de la presse, cette plainte risque d’être sans suite.

Pour la famille Murdoch, l’enjeu est de taille. En effet, News- Corp. détient 39 % de BSkyB, l’opérateur britannique de télévision par satellite, et pourrait à l’avenir céder ses parts dans ITV à RTL Group en échange de la chaîne Channel Five, lancée en 1997 et contrôlée à 100 % par la filiale de Bertelsmann. James Murdoch parviendrait alors à prendre pied dans la télévision hertzienne britannique, son objectif étant de créer en Grande-Bretagne l’équivalent de la chaîne américaine Fox afin de contrebalancer la programmation de la BBC jugée trop à gauche.

La menace est sérieuse. Le 29 novembre, ITV a annoncé avoir débauché Michael Grade, le président de la BBC depuis 2004. Ce dernier avait, avec l’aide de Mark Thompson, le directeur général de la BBC, rétabli l’autorité du service public audiovisuel britannique après le rapport de Lord Huton, accusant la BBC d’avoir poussé au suicide, par des accusations infondées, le spécialiste de l’Irak David Kelly. Michael Grade négociait également la nouvelle charte de la BBC à qui les lobbies privés reprochent d’utiliser la redevance pour développer les activités commerciales de sa filiale BBC World. Ces derniers ont obtenu en partie gain de cause. Le 18 janvier 2007, Tessa Jowell, la ministre britannique de la culture, a annoncé au Parlement que la redevance augmenterait de 3 % pour les deux prochaines années, puis de 2 % ensuite, soit un rythme inférieur à celui de l’inflation. La BBC perd donc de ses moyens financiers alors même qu’elle espérait une redevance majorée de 2,3 % par rapport à l’inflation.

Côté ITV, Michael Grade devra relancer ITV1, la première chaîne privée hertzienne en Grande-Bretagne, dont la part de marché est passée de 35% à 20% en dix ans alors que la BBC, longtemps en perte de vitesse, est remontée à 36,2 % de parts de marché. Enfin, Michael Grade aura également pour mission de réformer les grilles de programmes des trois chaînes numériques du groupe, ITV2, ITV3 et ITV4.

Sources :

  • « Bataille Murdoch-Branson en vue pour le contrôle d’ITV », Marc Roche, Le Monde, 21 novembre 2006.
  • « ITV repousse l’offre de fusion du câblo-opérateur NTL », Isabelle Chaperon, Les Echos, 22 novembre 2006.
  • « Les nouveaux défis du groupe de télévision privé anglais ITV », Marc Roche, Le Monde, 30 novembre 2006.
  • « La BBC affaiblie après le départ de son président pour le groupe privé ITV », Marc Roche, Le Monde, 5 décembre 2006.
  • « La BBC obtient une redevance plus faible que prévu », E.R., Les Echos, 19-20 janvier 2007.

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