Le 18 février 2010, Microsoft a annoncé que l’alliance conclue avec Yahoo!, le 29 juillet 2009 (voir le n°12 de La revue européenne des médias, automne 2009), avait été autorisée par les autorités américaine et européenne de concurrence. Alors que le Département américain de la justice (DoJ) n’a pas commenté sa décision, la Commission européenne s’est à l’inverse prononcée sans ambigüité en faveur de cette alliance qui, plutôt que de nuire à la concurrence, devrait la renforcer, au profit notamment des annonceurs. L’accord conclu entre Microsoft et Yahoo! prévoit en effet que Microsoft gère pour Yahoo! ses activités de recherche, en échange de quoi Yahoo! gère la vente des liens sponsorisés des deux sociétés, ceux affichés sur Yahoo! Search et ceux affichés sur Bing, le nouveau moteur de recherche de Microsoft.
Sur le plan technique, la qualité des réponses des moteurs de recherche est liée au nombre de requêtes traitées (principe du Click through rate – CTR, statistiques sur le taux de clic en fonction du nombre de fois où un lien est affiché en rapport avec un mot clé) : l’alliance Microsoft–Yahoo! va donc permettre à Microsoft d’affiner ses résultats en prenant en compte un nombre plus important de requêtes, donc de mieux concurrencer Google dans la pertinence des réponses apportées aux recherches des internautes. Selon comScore, en décembre 2009, le moteur de recherche Google a ainsi pris en charge 66,8 % des 131 milliards de recherches effectuées dans le monde, suivi en deuxième position de Yahoo! avec 7,2 % du marché mondial, du chinois Baidu (6,5 %) et de Microsoft (3,1 %). A l’exception des Etats-Unis, où l’alliance Microsoft–Yahoo! permettra à Bing de traiter près de 30 % des requêtes des internautes (17 % pour Yahoo! et 11,3 % pour Bing en janvier 2010), la domination de Google sur les autres marchés, à l’exception du cas particulier de la Chine, reste écrasante : la part des recherches sur Google en Europe est supérieure à 90 %, alors que Bing et Yahoo! ensemble peinent à atteindre les 5 % de part de marché. C’est ce qu’a confirmé la Commission européenne, prenant acte du fait que les différences en termes d’audience se traduisent sur le marché des liens sponsorisés : « Dans l’espace économique européen, les activités de recherche en ligne et les annonces liées à ces recherches sont très limitées pour Microsoft et Yahoo! et leurs parts de marché cumulées demeurent généralement inférieures à 10 % ».
Autant dire que cette alliance, plutôt que de limiter la concurrence, va la renforcer au profit des annonceurs qui pourront se tourner vers un interlocuteur plus important, même si Google reste à ce jour incontournable. C’est ce qu’a encore confirmé la Commission européenne qui a précisé que « non seulement les opérateurs n’attendent pas d’effet négatif de cette opération, mais ils en espèrent au contraire un renforcement de la concurrence ». A cet égard, Google a eu raison d’abandonner le projet d’accord qu’il avait initialement scellé avec Yahoo! en juin 2008, afin notamment de contrer la tentative de rachat de Yahoo! par Microsoft, car cet accord aurait été très certainement dénoncé par les autorités de concurrence. Le partenariat entre Microsoft–Yahoo! devrait être mis en place progressivement, d’abord aux Etats-Unis dès 2010, là où les enjeux d’audience sont les plus importants, puis étendu progressivement au reste du monde pour y être effectif en 2012. En effet, cet accord suppose une harmonisation des plates-formes technologiques pour la recherche et la commercialisation des liens sponsorisés entre Microsoft et Yahoo!, suivie d’un basculement des annonceurs des anciennes plates-formes vers les nouvelles.
Sources :
- « Feux verts en poche, Microsoft et Yahoo ! lancent leur partenariat », AFP, 18 février 2010.
- « Feu vert à l’alliance Microsoft-Yahoo ! », Virginie Robert et Alexandre Counis, Les Echos, 19 février 2010.