Italie : liberté d’investissement et pluralisme des médias et des communications électroniques

CJUE, 3 septembre 2020, aff. C-719/18, Vivendi SA c. Autorità per le Garanzie nelle Comunicazioni et Mediaset SpA.

Le phénomène dit de convergence entre les secteurs des médias et des communications électroniques peut conduire les autorités publiques nationales à vouloir fixer, à cet égard, au nom des garanties du pluralisme, des limites spécifiques à la concentration. Telle fut l’intention des autorités italiennes.

Sur la base des dispositions législatives adoptées en ce sens, prenant notamment en compte le pourcentage des recettes réalisées dans les secteurs considérés, l’Autorità per le Garanzie nelle Comunicazioni-AGCOM (Autorité de tutelle des communications), à la suite d’une plainte de Mediaset, a ordonné au groupe français Vivendi de mettre fin à sa prise de participation dans le capital du groupe italien Mediaset (dont il détenait, avant d’en céder une partie, 28,8 %, ce qui ne lui en donnait cependant pas le contrôle) ou de Telecom Italia (dont il détenait 23,94 %).

À l’occasion d’un recours de Vivendi contre cette décision de l’AGCOM, la juridiction italienne a saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’une question préjudicielle concernant la conformité de la législation nationale en cause aux principes, du droit européen, de liberté d’investissement et d’établissement d’entreprises européennes d’un État membre dans un autre. Dans l’arrêt du 3 septembre 2020, aff. C-719/18, ladite Cour conclut par la négative.

Selon cet arrêt, la disposition contestée « ne saurait être considérée comme étant de nature à atteindre l’objectif qu’elle poursuit, dès lors qu’elle fixe des seuils qui sont sans relation avec le risque existant pour le pluralisme des médias », les seuils retenus « ne permettant pas de déterminer si et dans quelle mesure une entreprise est effectivement en mesure d’influer sur le contenu des médias ».

Il en est conclu qu’« il convient de répondre aux questions préjudicielles posées que l’article 49 » du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne relatif à la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre dans le territoire d’un autre État membre « doit être inter­prété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation d’un État membre ayant pour effet d’empêcher une société immatriculée dans un autre État membre, dont les recettes réalisées dans le secteur des communications électroniques sont supérieures à 40 % des recettes globales réalisées dans ce secteur, de réaliser, dans le système intégré des communications » (presse, édition, radiodiffusion, services de médias audiovisuels, cinéma, publicité…), « des recettes supérieures à 10 % de celles réalisées dans ce système ».

Au regard des exigences européennes de liberté d’investis­sement et d’établissement, les dispositions législatives nationales visant à garantir le pluralisme des médias doivent, pour être acceptées, cependant se justi­fier « par des raisons impérieuses d’intérêt général » et présenter un caractère nécessaire et proportionné à l’objectif poursuivi. Un délicat équilibre des droits doit, à cet égard, être établi.

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