Li-Fi : une communication bidirectionnelle

Alternative à la technologie Wi-Fi, la connexion internet par la lumière LED permet désormais, non seulement de recevoir, mais également d’émettre des informations. L’éclairage LED ne serait cependant pas inoffensif pour l’œil.

Le Li-Fi (Light Fidelity), technique de transmission optique par des lampes LED (light-emitting diodes ou diodes électroluminescentes), permettait jusqu’ici la réception de données numériques sur des appareils – ordinateur, smartphone, imprimante… – placés dans la zone éclairée (voir La REM n°25, p.19 et n°29, p.26). L’entreprise française Lucibel est parvenue à mettre au point un système d’éclairage assurant une connexion bidirectionnelle offrant un débit théorique de 1 gigabit par seconde. Connecté à l’internet par un câble Ethernet, le luminaire Li-Fi de Lucibel diffuse les données numériques grâce aux ampoules LED avec un débit descendant de 10 mégabits par seconde. Décodant – c’est-à-dire transformant les variations de l’onde lumineuse en code binaire (0-1) –, le récepteur branché sur le terminal, désormais, peut également émettre vers l’ampoule, par liaison infrarouge, avec un débit montant de 5 à 10 mégabits par seconde. Depuis juin 2015, cette solution Li-Fi en émission-réception est expérimentée au sein de la société parisienne Sogeprom, filiale de la Société générale, spécialisée dans l’immobilier. Installé au plafond des salles de réunion, le système de luminaire Li-Fi de Lucibel permet de couvrir toute la superficie d’une pièce ainsi équipée. Le 11 septembre 2015, la démonstration publique d’une communication par Skype, logiciel de téléphonie IP, s’est révélée concluante, avec un débit égal à celui d’une box ADSL.

La réussite de ces tests récemment effectués montre que le Li-Fi représente désormais une alternative sérieuse au Wi-Fi, technologie de communication sans fil la plus communément employée, mais néanmoins interdite dans certains lieux comme les hôpitaux en raison des risques d’interférences avec les appareils électroniques (IRM notamment) et les crèches à des fins de précaution sanitaire. Le Li-Fi procure un débit de transmission dix fois supérieur à celui du Wi-Fi. En revanche, il n’offre guère l’avantage de la mobilité, contrairement à ce dernier et oblige le maintien des terminaux dans le champ lumineux. Cependant, il assure aussi une connexion mieux sécurisée puisque la lumière ne franchit pas les murs.

L’entreprise Lucibel envisage de commercialiser ses équipements Li-Fi dès 2016 et d’équiper notamment, en priorité, les établissements hospitaliers dans les prochaines années. D’autres secteurs comme la finance et la défense trouveront un intérêt à recourir à une technologie assurant davantage de confidentialité. Mais il faudra encore convaincre les principaux fabricants de produire les terminaux adaptés pour que le grand public puisse en bénéficier.

En outre, la technologie Li-Fi constituera peut-être un jour la solution pour permettre aux personnes se déclarant allergiques aux ondes électromagnétiques de rester connectées. Ces électro-hypersensibles (EHS) qui souffrent de maux de tête, d’insomnie, de sensations de brûlure, de vertiges, de perte de motricité ou de défaut de concentration représenteraient 3 % de la population selon les associations qui les défendent. Répertoriée par l’Organisation mondiale de la santé, assimilée à un handicap en Suède et à une maladie en Angleterre, cette pathologie fait encore l’objet de batailles d’experts en France. A côté de ce succédané de considération que constitue l’entrée de l’expression dans le dictionnaire Larousse cette année, un tribunal de Toulouse a reconnu, en juillet 2015, « l’existence d’un handicap grave dû à l’hypersensibilité aux ondes magnétiques », une première dans l’Hexagone. Relevant que cette pathologie toucherait dorénavant des enfants, l’eurodéputé EELV Michèle Rivasi propose de créer des refuges, à l’instar de la Suisse et des Etats-Unis, et même d’intégrer des zones blanches aux plans d’urbanisme.

Alors que l’électro-hypersensibilité fait encore sourire, « le stress toxique pour la rétine » provoqué par la lumière bleue (nécessaire à la « blancheur » de la lumière) émise par les LED, comparable aux UV et identifié par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) dans une étude datant de 2010, prête également à controverse. « Les enfants sont très sensibles à ce risque : leur cristallin très transparent ne peut assurer son rôle efficace de filtre de la lumière bleue », expliquait l’Anses. Economiques, de longue durée et avec un faible coût de production, les LED sont aujourd’hui utilisées, outre l’éclairage, pour de très nombreux équipements (voitures, téléviseurs, smartphones, ordinateurs, voyants lumineux, flashs d’appareil photo, jouets, etc.). Publiée en avril 2015 dans la revue Free Radical Biology and Medicine, une récente étude de l’Inserm laisse craindre que « les LED [ne] provoquent une accumulation de petites lésions rétiniennes au fil des ans ». Tandis que leur intensité lumineuse est jusqu’à 1 000 fois plus élevée, les normes qui leur sont applicables sont celles des ampoules classiques. « Les mutations radicales de nos technologies d’éclairage peuvent avoir des conséquences sanitaires qu’il s’agit de comprendre », alerte Francine Behar-Cohen, directrice de recherche à l’Inserm, qui a présidé le groupe de travail sur les LED de l’Anses. Les LED de seconde génération seront vingt fois plus lumineuses alors que ce type d’éclairage aura remplacé tous les autres dans dix ans.

Sources :

  • « Electrohypersensibles : sous le feu des ondes, ils fuient le monde », AFP, tv5monde.com, 13 juillet 2015.
  • « Les diodes luminescentes sous l’œil inquiet des chercheurs », Florence Rosier, Le Monde, 12 août 2015. 
  • « Justice. Reconnaissance d’un handicap dû aux ondes », Les Echos, 26 août 2015. 
  • « Li-Fi : Internet à haut débit par la lumière, c’est pour demain », Amélie Charnay, 01net.com, 11 septembre 2015.
  • « Li-Fi : l’Internet haut débit par la lumière arrive en 2016 », Marc Zaffagni, futura-sciences.com, 15 septembre 2015.
Ingénieur d’études à l’Université Paris 2 - IREC (Institut de recherche et d’études sur la communication)

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici